La réutilisation
des eaux usées à de multiples ‘’fins’’
L’accès à l’eau, trésor naturel, est devenu l’un des plus grands défis humanitaires. Sa préservation, sa gestion, sont deux défis auxquels la population mondiale doit relever afin de limiter les conséquences de pénuries d’eau dues notamment à l’augmentation démographique et au changement climatique.
Aussi bien porteur d’enjeux sanitaires, budgétaires et environnementaux, une mobilisation générale est nécessaire, notamment de la part des acteurs économiques et industriels.
Sur notre planète bleue, la réflexion de son accessibilité reste entière puisque, 97 % de l'eau présente n'est pas potable (eau salée). Et que seulement 2,5 % des eaux de la terre sont douces et seulement 10 % de celles-ci sont facilement accessibles à l'homme, le solde étant sous forme de glaciers. Cette eau potable représente 40 000 km3, soit environ 7 500 m3 d'eau douce par an et par personne.
Une situation inégale puisque la disparité des consommations en eau des individus est marquante. Près de 60 % des réserves d'eau douce de la planète sont réparties sur seulement 9 pays : Brésil, Russie, États-Unis, Canada, Chine, Indonésie, Inde, Colombie et Pérou. Exemple encore plus frappant, un américain consomme 600 litres d’eau par jour, un européen en moyenne entre 200 et 500 litres et a contrario certaines populations manquent d'eau et doivent se contenter de quelques litres sachant que 50 litres d'eau douce par jour sont nécessaires pour la survie de chaque personne.
Cette situation paradoxale montre que cette consommation n'est pas répartie de manière homogène sur la planète. Mais outre ces inégalités, d’autres défis sont également à relever. La pollution de l’eau et son gaspillage, en effet seuls 55 % des prélèvements d'eau potable sont réellement consommés, le reste étant perdu en fuites et en évaporation.
L’évolution consumériste, l’accroissement de la population, entraineront des besoins en eau toujours plus croissant.
A ce propos, l’importance de la recherche sur les réseaux d’eau potable aussi bien technique que scientifique permet d’accroître le potentiel des méthodes et des technologies clés pour les services de demain.
Les motifs d’une réutilisation des eaux usées constituent l’une des voies majeures qui répondent à un objectif quantitatif d’approvisionnement en eau. En parallèle, dans le domaine de la préservation environnementale, et donc des objectifs qualitatifs, de nombreuses idées ont conduit à des opérations de réutilisation. L’objectif quantitatif est déterminant dans la naissance de projets concernant la réutilisation des eaux traitées. Pour répondre à des pénuries chroniques ou occasionnelles, et après prise en compte des coûts d’investissement et d’exploitation, la réutilisation des eaux usées s’impose de plus en plus comme une solution économiquement pertinente.
Les eaux usées collectées (sur les 1 140 milliards m3/an affectés à l’eau domestique et industrielle) représentent 370 milliards m3/an et un peu moins de la moitié fait l’objet d’un traitement, soit 160 milliards m3 /an. On estime à 2 % de ce total, soit 7 milliards de m3/an, la fraction de ces eaux usées traitées qui sont réutilisées à ce jour tous usages confondus. Dès lors, s’il est justifié scientifiquement ?
Le gisement des eaux usées traitées encore à recycler demeure important et donc valoriser l’eau dans cette logique est donc l’une des réflexions sur lesquelles les contextes sociopolitiques, les us culturelles et les réalités économiques, peuvent influencer les arbitrages qui seront menés entre les acteurs.
Comprendre et suivre le cycle naturel de l’eau à savoir précipitation – ruissellement – évaporation – précipitation – etc… permet globalement la conservation de la masse hydrique sur le globe.
L’usage de l’eau par l’homme suit en parallèle le même diagramme, prélèvement dans le milieu, utilisation, puis le retour dans le milieu. A une différence près tout de même, si le cycle naturel de l’eau reste naturel, l’usage de l’eau par l’homme fait appel au principe anthropique, ce qui est prélevée au milieu pour les activités humaines, est restituée au milieu pollué.
Malgré ce rejet polluant, il est des milieux récepteurs qui possèdent des facultés à dépolluer. Des effets d’assainissement dont les caractéristiques liées aux mécanismes de la dissolution, de la modification naturelle physico-chimique et du pouvoir bactéricide du soleil, du sol et du temps, ont très longtemps servi à assurer une dépollution naturelle. Ces effets ont en quelque sorte permis d’échapper aux questions environnementales posées par les rejets des eaux usées par l’activité humaine.
Hors, plus il y a de rejets moins le milieu récepteur aura la faculté ou l’aptitude à dépolluer. Il est donc devenu indispensable de poser certaines réflexions sur l’évolution de nos eaux usées …
L’objectif d’une réutilisation des eaux usées est pertinent et présente le double avantage à la fois de raccourcir le cycle par une remobilisation rapide de la ressource et l’utilisation deux fois d’une eau mobilisée dans le milieu pour des activités en cascade.
Un cycle court ou dans un autre cas dans un cycle long…
- Dans une logique de cycle court, le traitement de l’eau ayant alors pour objectif de respecter uniquement les normes ou recommandations fixées pour une réutilisation.
- Dans une logique de cycle long, leur faire subir un traitement visant :
* dans un premier temps à un retour de l’eau au milieu naturel sans préjudice pour ce milieu,
* puis dans un second temps à sa reprise pour réutilisation avec une compatibilité de la qualité de l’eau avec les usages souhaités après son parcours dans le milieu naturel. Cela concerne simultanément les questions d’objectifs de qualité, d’autoépuration puis de respect des normes ou recommandations d’une réutilisation des eaux usées.
Hormis les eaux thermales et minérales, pratiquement tous les domaines relatifs aux usages de l’eau sont concernés par la réutilisation.
@SUEZ Environnement
A travers la valorisation des eaux usées dans un cycle court :
La valorisation agricole et forestière est le principal consommateur mondial pour l’usage de l’eau, en volume. La valorisation des eaux usées à travers le monde et les circonstances de sa mise en œuvre sont multiples : périmètres irrigués exclusivement avec des eaux usées traitées, des périmètres mixtes (certains irrigants s’alimentent au réseau d’eaux usées et d’autres sont autonomes), des dispositifs avec stockage ou transfert amont etc...
Dans le cas d’une réutilisation des eaux usées en milieu agricole, la capacité d’application de tout périmètre irrigué tient des considérations sociales et sociologiques admissibles par les usagers ainsi que les particularités agronomiques associées à la qualité des eaux usées traitées.
S’agissant des usages citadins, la valorisation des eaux usées permet l’utilisation de :
- l’irrigation d’espaces verts (par réseau spécifique ou par camionnage), dont la gestion incombe le plus souvent à la collectivité,
- l’alimentation de plans d’eau récréatifs : cette valorisation s’apparente également à la catégorie du cycle long car souvent les eaux usées traitées viennent s’ajouter à l’eau de plans d’eau existants
- le lavage des rues et des marchés (à l’instar de ce qui se pratique dans certains ports avec des aiguades alimentées en eau de mer)
- des recyclages d’eaux grises à l’échelle d’un immeuble en vue d’alimenter des circuits particuliers de chasse d’eau ;
Sur une réutilisation des eaux usées en milieu d’aquaculture, son application est encore relativement rudimentaire à travers le monde mais elle est déjà pratiquée en Inde ainsi que des pays asiatiques à la fois comme procédé d’épuration et pour l’économie piscicole qui en résulte.
Autre voie importante, celle industrielle. Les applications sont nombreuses et on peut classer les secteurs où se pratique la réutilisation des eaux usées en fonction des différentes catégories d’activités industrielles : Le secteur chimique et para chimique ; Le secteur agro alimentaire ; celui du cuir et du textile ; le secteur des industries mécaniques, métallurgiques et électroniques. La réutilisation des eaux usées dans le cadre des circuits de refroidissement constitue un exemple fréquent. A cela s’ajoute les économies d’eau à l’intérieur d’une unité industrielle par recyclage des eaux de process qui est en quelque sorte une réutilisation interne.
Enfin, la valorisation à des fins d’adduction d’eau potable. La réutilisation des eaux à des fins de consommation en eau potable est une spécificité qui à l’heure actuelle ne connaît qu’un petit nombre de projets. En Australie, la ville de Goulburn a mis en œuvre un projet de ce type. C’est également le cas en Namibie (Windhoek), ou à Singapour ou l’eau est mixée avec une ressource conventionnelle. On comprend aisément que le premier frein à ces projets est d’ordre psychologique. Par ailleurs les méthodes de traitement et leur fiabilité doivent être exemplaires pour permettre d’envisager de tels projets.
A travers un cycle long, les organisations hydrauliques sont constituées d’une part du cycle naturel de l’eau de pluie et d’autre part celui des eaux usées plus ou moins traitées, les deux devant se joindre.
Les milieux récepteurs peuvent apporter des possibilités de traitement additionnel des eaux rejetées avant le prélèvement en vue de la réutilisation des eaux usées traitées. Notamment dans le d’une recharge de nappes :
Le dispositif de la recharge de nappe consiste à faire infiltrer ou percoler les eaux usées traitées dans le sous sol. On poursuit de la sorte plusieurs objectifs :
- La restauration d’une nappe surexploitée par excès de pompage et dont le rabattement est préjudiciable,
- La protection des aquifères côtiers contre l'intrusion d’eau salée,
- Le stockage des eaux pour une utilisation différée,
- l’amélioration du niveau de traitement de l’eau, utilisant de la sorte le pouvoir autoépuration du sol
- la protection de l’environnement en évitant de rejeter les effluents dans un cours d’eau ou en mer.
Les techniques de recharge reposent sur deux systèmes principaux de circulation de l'eau :
a) l'infiltration depuis la surface, dans des bassins ou des lits de cours d’eau,
b) l'injection profonde, par puits ou forages, où l'eau est introduite directement dans la nappe souterraine.
Les formations du sous sol agissent généralement comme un filtre dont l’effet est d’éliminer un certain nombre des constituants physiques, chimiques et microbiologiques des eaux usées traitées, c’est le « pouvoir épurateur » du sous sol, qui améliore la qualité de l’eau et constitue souvent le principal objet de recharge par les eaux usées traitées : ces procédés d’épuration complémentaire constituent les systèmes de géo-épuration.
Quel qu’en soit le mode, il est nécessaire d’avoir une connaissance précise du devenir des quantités injectées et de leurs écoulements dans le sous sol, afin de pouvoir évaluer le rendement de la recharge et déterminer les quantités éventuellement récupérables.
Toujours dans un cycle long, le soutien d’étiage peut avoir pour objectif le maintien en vie faunistique d’un tronçon de cours d’eau. Il peut aussi viser à fournir à un cours d’eau un débit dont la destination est d’être partiellement récupéré à l’aval pour différents usages dont principalement l’irrigation.
Enfin, l’alimentation de zones humides, en liaison avec les objectifs des sites sous convention Ramsar, la sauvegarde de zones humides par des eaux usées traitées constitue à ce jour un domaine non négligeable de la réutilisation des eaux usées. Là aussi ce sont principalement les enjeux floristiques et faunistiques qui sont ciblés, et plus globalement la sauvegarde et la valorisation du patrimoine environnemental.
@SUEZ Environnement
Pour traduire concrètement l’intérêt de la réutilisation des eaux usées, Suez-Environnement a doté le bassin Cannois d’une usine de traitement des eaux usées afin de mettre en conformité son système d’assainissement avec la directive européenne eaux résiduaires urbaines. L’aboutissement après trois ans de travaux du projet «Aquaviva » de Lyonnaise des Eaux, montre une conception novatrice qui s’appuie sur la technologie d’ultrafiltration par bio-réacteur à membranes développée par Degrémont, filiale du groupe Suez-Environnement.
La qualité des eaux traitées obtenue par l’ultrafiltration permet leur utilisation pour de nouveaux usages tels que l’arrosage de golfs ou d’espaces verts ou pour le nettoyage des voiries et des réseaux d’assainissement, économisant par conséquent autant d’eau potable prélevée dans les ressources en eau du territoire.
L’ensemble des besoins en eau de service sur la station est aussi satisfait par l’utilisation de l’eau traitée ainsi régénérée.
Les eaux usées amenées vers la station traversent différentes étapes de traitement avant leur retour à la nature. Détails :
LE PRE-TRAITEMENT - Dégrillage - Dessablage - Dégraissage
Une fois relevées par pompage, les eaux usées sont dirigées vers des dégrilleurs fonctionnant comme des peignes mécaniques qui permettent de retenir les déchets les plus grossiers (papier, plastique, ...).
Ensuite, l’eau circule dans un bassin et s'écoule doucement afin que les sables et les graviers se déposent au fond tandis que les huiles et les graisses remontent à la surface.
Le tamisage vise à éliminer les ultimes matières solides contenues dans les eaux usées à travers un tamis de 1 mm.
@SUEZ Environnement
Le traitement des eaux usées s’effectue par le procédé UltraforTM de Degrémont, filiale de Suez Environnement. Un procédé qui combine le traitement biologique et la filtration par membrane. Les eaux usées sont envoyées vers des bassins dans lesquels sont élevées des bactéries capables de consommer la pollution organique. Ces bassins sont équipés de diffuseurs de fines bulles d’air qui, en oxygénant le milieu, accélèrent le processus. L’excédent de bactéries est appelé « boues biologiques »
Après le traitement biologique, les eaux passent par une phase de traitement membranaire. La filtration membranaire permet de séparer l’eau épurée et les boues produites dans le bassin d’aération. Les membranes, disposées en modules, sont immergées directement dans le bassin ou dans une cuve annexe. Elles ressemblent à des spaghettis de 2 mètres de long et leur porosité est inférieure à celle de la peau. L’eau traitée est aspirée à travers les membranes par des pompes tandis que les boues en excès sont extraites du bassin.
Le maintien de la perméabilité des membranes est maîtrisé en combinant et en adaptant les opérations d’aération cyclique de rétro-lavage, de lavage de maintenance et de régénération. Les réactifs de lavage sont choisis en fonction de la nature de l’eau à traiter.
Ce traitement membranaire permet une dépollution très poussée des eaux usées et représente une véritable maîtrise du risque sanitaire. En effet, ces membranes organiques immergées forment une barrière physique, capable de retenir toutes les bactéries et les micro-organismes, laissant passer les sels minéraux. Les eaux épurées peuvent alors être réutilisées pour l’arrosage des espaces verts ou le nettoyage des voiries ou rejoindre la mer sans dommage pour la flore et la faune marines.
Les boues issues du traitement biologique sont acheminées vers des centrifugeuses qui assurent leur déshydratation afin d’obtenir une siccité de 18 à 22 % (soit 78 % à 82 % d’eau) facilitant leur séchage sur place grâce au sécheur thermique de boues dont est dotée Aquaviva.
Les 20 000 tonnes de boues produites chaque année en sortie de centrifugeuse sont ainsi réduites, après séchage, à moins de 4 000 tonnes.
@SUEZ Environnement
Degrémont Technologies, filiale de Suez-Environnement a développé une technologie de séchage des boues en utilisant le sécheur thermique Innodry 2e. Bénéficiant d’une sécurité opérationnelle optimale et d’une efficacité et fiabilité éprouvée, cet équipement permet des économies d’énergies de plus de 30 % comparé à d’autres technologies de séchage de boue.
Ces boues sont ensuite valorisées en agriculture, conformément aux normes et à la réglementation française et européenne afin de permettre une utilisation durable des sols agricoles, dans le respect absolu de la protection de l’environnement et de la santé.
Le séchage des boues permet leur hygiénisation, et leur désodorisation. Elles deviennent également facilement stockables et manipulables ce qui permet après homologation leur conditionnement en substrat d’engrais agricole.
Le taux de siccité des boues séchées (plus de 90%, soit moins de 10% d’humidité seulement) leur confère un pouvoir calorifique équivalent à celui du bois et permet par conséquent d’envisager aussi leur valorisation énergétique en substitution d’énergies fossiles.
@SUEZ Environnement