Inévitable disparition de la Mangrove du Guyana
L’Organisme IRD - Institut de Recherche pour le Développement, a rendu un communiqué s’alarmant sur la mangrove qui ne protègerait plus le trait de côte du Guyana.
L’institut mentionne que contrairement à la côte voisine, la mangrove de la Guyane française qui est en encore relativement préservée, celle du Guyana est en train de disparaître en raison d’un large aménagement.
Un aménagement afin de développer l'agriculture et l'aquaculture, des digues de terre a été érigé, détruisant en grande partie la forêt de palétuviers. Une étude de chercheurs de l'IRD et d'Aix-Marseille Université montre que la réduction de la protection qu'assure la mangrove contre la houle entraînera une érosion à grande échelle des 370 km de côtes du pays. Seul un programme de réhabilitation de l'écosystème permettra d'endiguer le phénomène.
Les mangroves se développent dans la zone de balancement des marées des régions intertropicales. Elles constituent un écosystème forestier tropical soumis aux processus océanographiques, sédimentaires et géomorphologiques, mais également aux pressions anthropiques. Ces forêts de palétuviers fournissent de nombreux biens et services écosystémiques, par exemple pour la pêche côtière ou la protection du littoral: un hectare de mangrove rapporterait entre 200000 et 900000 $ par an.
La mangrove est une forêt spécifique des zones de marée des littoraux tropicaux, constituée de palétuviers qui poussent les pieds dans l'eau (voir aussi La mangrove, filtre pour les métaux lourds). Elle couvre les trois quarts des littoraux tropicaux, soit près de 200000 km!. Sa surface mondiale a été réduite de 30 % en 20 ans, essentiellement du fait de l'élévation du niveau de la mer.
Le manque de prise en compte des caractéristiques physiques de l'environnement côtier (tel que cycle des marées, élévation du substrat, etc.) et du fonctionnement des palétuviers explique souvent les problèmes rencontrés. Dans ce contexte, il est important de se rappeler que les forêts de mangroves ont naturellement la capacité de résister à de fortes contraintes de différents types. Apprendre des régions encore préservées comment l'écosystème de mangrove interagit avec son environnement côtier est donc un objectif urgent.
Le cas des côtes du Guyana jusqu’à la Guyane française correspond à ce souci d'apporter des connaissances pertinentes à la gestion durable de cet écosystème.
Le littoral français guyanais est peu perturbé par les activités anthropiques, celles qui s’y développent localement peuvent être fortement contraintes par l’instabilité sédimentaire. L’influence du système de dispersion des sédiments issus du fleuve Amazone, et entraînés par les courants marins vers le Nord Ouest, se traduit en Guyane française par un bouleversement récurrent et profond de son paysage littoral. Organisés en bancs de vase mobiles migrant le long de la côte, ils font alterner en chacun des points du littoral des phases d’accrétion intenses et des épisodes d’érosion spectaculaires. Une grande instabilité caractérise ainsi la ligne de côte guyanaise, et ce contexte particulier induit pour la mangrove, seul écosystème adapté à la colonisation de cet environnement fortement contraint, des stratégies de fonctionnement et d’évolution originales. L’établissement des peuplements pionniers de palétuviers sur les bancs de vase néoformés, leur structuration en faciès successifs, leurs dynamiques de croissance, et la disparition des peuplements anciens, sont autant de processus étroitement dépendants et révélateurs de l’alternance des phases sédimentaires.
Quatre espèces caractérisent cet écosystème: Avicennia germinans, Rhizophora ssp, Laguncularia racemosa et Conocarpus erectus. Les deux premières sont les espèces dominantes de la mangrove littorale. Les substrats vaseux néoformés sont rapidement colonisés par les deux espèces pionnières Avicennia germinans et Laguncularia racemosa. Cette dernierièreest cependant rapidement contrainte par A. germinens qui se développe plus rapidement. Au bout de quelques années, la frange littorale de mangrove est devenue un peuplement quasiment monospécifique à A. germinens. Toutefois, des individus de Rhizophora qui s'installent en sous bois ont la capacité de limiter la régénération des propagules de A. germinens et ainsi de transformer peu à peu la composition spécifique du peuplement. Avec des vitesses de croissance en hauteur mesurées entre 2 et 4 mètres par an, et des biomasses aériennes atteignant les 470 tonnes de matière sèche à l'hectare, la vitalité des mangroves guyanaises est certainement un atout sur cette côte particulièrement instable.
Le Guyana , anciennement Guyane britannique, est le 3e pays le plus petit d'Amérique du Sud et l'un des plus pauvres . C'est également le seul pays anglophone du continent. La plaine côtière, qui représente 5 % de la superficie du pays, abrite plus de 90 % des 770 000 habitants. Les mangroves des Guyanes - Guyane française, Surinam et Guyana -,qui s'étalent entre les deltas de l'Orénoque et de l'Amazone, comptent parmi les plus vastes au monde. Cet écosystème particulier, entre terre et mer, joue un rôle majeur dans la protection contre l'érosion de la côte vaseuse( 2), particulièrement instable. Mais la mangrove du Guyana a été en grande partie détruite pour aménager la plaine littorale. Ce recul du rideau de palétuviers se traduira par une érosion côtière à grande échelle, menaçant les populations et leurs activités économiques, comme le révèle une étude de chercheurs de l'IRD et d'Aix-Marseille Université.
Gagner du terrain sur la mer Si le littoral de Guyane française demeure pour le moment préservé des aménagements humains, celui du Guyana est déjà fortement anthropisé. L'ensemble de la bande côtière est désormais habitée*. Pour conquérir cet espace puis pour développer l'aquaculture et l'agriculture - essentiellement la riziculture, les zones marécageuses littorales ont été aménagées en « polders »( 3). Pour ce faire, des digues ont été élevées, réduisant la frange de mangrove d'1 km à seulement quelques dizaines de mètres de large.
Des digues moins protectrices : Sur les 450 km de côtes le long de l'Atlantique que compte le Guyana, plus des trois quarts sont aujourd'hui endigués. De ces digues de terre dépend désormais la stabilité de la ligne littorale. Mais celles-ci n'assurent pas une aussi bonne protection que les mangroves contre la houle, première cause d'érosion. D'ailleurs elles ne résisteraient pas à la force des vagues si les mangroves venaient à disparaître complètement. Or elles empêchent la sédimentation du limon en provenance de l'Amazone, qui permet à la forêt de se régénérer.
La stabilité du littoral en danger : Les scientifiques ont identifié les principaux processus géomorphologiques à l'oeuvre tout au long du littoral guyanien. Ils ont ainsi évalué les risques élevés de déstabilisation de la ligne côtière du fait de la diminution de la mangrove. Des digues rocheuses sont actuellement construites, dans le but de sauvegarder les activités économiques comme l'agriculture. Mais de tels ouvrages ont des coûts prohibitifs. Le seul moyen de lutte consiste à réhabiliter la mangrove. Cette expertise permettra au gouvernement guyanien de préciser les mesures d'action à mettre en place et aider les palétuviers à recoloniser l'espace littoral. La Guyane française, dont la zone côtière subit à son tour une pression démographique croissante, doit également tirer des enseignements de ces travaux pour ne pas rencontrer à moyen terme les mêmes problèmes que son voisin.