L’éclat éternel du musée de l’Acropole
L’architecture muséale, interprétée comme “machine expositive” de la culture contemporaine, a adopté une nouvelle centralité dans la production d’édifices contextualisés, monumentaux et scénographiques selon la créativité de l’auteur. A partir des années quatre-vingt, on conçoit des architectures aux solutions formelles multiples, semblables à des sculptures, souvent plus importantes que leurs contenus, afin qu’elles adoptent une valeur iconique avec le temps.
Le nouveau Musée de l’Acropole de Bernard Tschumi (2009) se dresse aux pieds du Parthénon, dans le quartier historique de Makryanni, zone “charnière” entre les fouilles archéologiques et la ville contemporaine. Il contient plus de 350 vestiges et sculptures de la Grèce antique et couvre un espace d’exposition de 14 000 mètres carrés, réparti sur trois niveaux de 23 mètres de hauteur chacun.
L’architecte franco-suisse, connu pour son “Parc de la Villette” à Paris (1982), a choisi pour son musée un conteneur simple et essentiel, aux proportions mathématiques, dans le respect de la symétrie et de l’harmonie de l’architecture grecque. La protagoniste du projet est, d’une part, la lumière naturelle qui modèle les espaces d’exposition et les œuvres exposées, et d’autre part, une lecture inédite de l’espace muséal qui se “transforme en vitrine” et, avec la Galerie du Parthénon située au 3e étage, offre un panorama imprenable à 360° sur l’Acropole et l’Athènes moderne.
Le noyau principal de la collection est représenté par les œuvres de la période Archaïque (VIe siècle av. J.-C.), profanées en 480 av. J.-C. par les Perses, auxquelles s’ajoutent les sculptures de la période Classique (Ve siècle av. J.-C.) avec les marbres de Phidias, Miron, Polyclète.
La visite du musée commence dans le hall, marchant sur des dallages vitrés qui montrent et protègent les fouilles archéologiques grâce à une solution de colonnes et pilotis placés un par un, en accord avec les archéologues, de façon à ne pas provoquer de dommages aux pièces. Dans le premier niveau se trouvent le salon d’entrée et les espaces des expositions temporaires, un auditorium, une librairie et d’autres services annexes. On accède à la Galerie Archaïque par une rampe en verre donnant sur les fouilles archéologiques, où se trouvent des pièces allant de la période Archaïque à la période Romaine. Ce niveau se présente comme un espace spectaculaire à double hauteur soutenu par de hautes colonnes, où le spectateur peut se déplacer librement et observer les œuvres de différents points de vue. Au 3e étage, on accède, partant de l’espace rectangulaire de la Galerie du Parthénon structurée autour à une cour intérieure légèrement tournée pour suivre l’orientation originaire de la Frise, avec ses murs transparents qui utilisent des technologies du verre innovantes afin de protéger l’espace contre la chaleur et la lumière excessives. Les vitres, à part le fait de moduler un espace rigide et symétrique, offrent un éclairage “naturel”, idéal pour les sculptures, placées en comparaison visuelle directe avec l’Acropole.
La Galerie du Parthénon est un musée dans le musée, car elle offre au spectateur une reconstitution sans précédents, où l’on a reconstruit la Frise (actuellement fragmentée et dispersée dans plusieurs musées du monde), le positionnement des métopes entre les colonnes et le déroulement des frontons du Parthénon. Le parcours expositif est une expérience archéologique et esthétique structuré, comme une narration historique dans un espace qui se déroule à travers des œuvres d’art antique, dans un endroit conçu pour être traversé, de l’entrée jusqu’à la spectaculaire Galerie du Parthénon, comme un voyage dans le temps, à la recherche des origines de la Beauté.
Le musée est une structure simple, envisagée pour l’utilisation immédiate des contenus, sobre et classique même dans l’usage de matériaux traditionnels comme le béton, le verre et le marbre, dont le choix même semble la matérialisation de la volonté de créer un pont entre le passé et le présent. Le béton, aussi bien préfabriqué que coulé en place, constitue la structure principale de l’édifice et sert de fond à la plupart des œuvres exposées. Le marbre (antiquité) met l’accent sur les sols : noir pour les espaces de circulation et beige clair pour les galeries et les structures en béton (modernité). Les baies vitrées, entièrement transparentes, filtrent délicatement la lumière par un système de sérigraphies et offrent un dialogue constant entre l’extérieur et l’intérieur.
Le musée de Tschumi a été conçu comme un ouvrage destiné à durer dans le temps et à vieillir avec élégance, conservant les œuvres symboliques de la Grèce classique dans une architecture qui est, à son tour, le symbole de la Grèce moderne.