Le déclin annoncé du chauffage électrique ?
En publiant récemment son bilan prévisionnel de l’équilibre offre-demande d’électricité en France, RTE a fait paraître une évolution delà croissance delà demande nationale à la baisse en raison de facteurs conjoncturels notamment la crise économique, mais aussi ralentit par la mise en place de la réglementation thermique et de l’application de certaines mesures d’efficacité énergétique. Certes la crise a nettement ralentit la demande électrique mais l’apparition de nouvelles actions réglementaires impactent la structure de la consommation et plus particulièrement à l’ensemble d’appareillage industriel plus performant ainsi que des transferts entre énergies sont apparues et donc greffe l’évolution de la demande électrique.
Le développement soutenu du chauffage électrique dans la construction résidentielle, catalysé par la forte hausse du prix des énergies fossiles, avec des parts de marché qui avaient atteint 73% en 2008, dans une période où, en sus, le marché de la construction neuve avait été particulièrement dynamique.
A l’inverse, une tendance à la baisse s’est largement amorcée du fait de l’anticipation de la RT 2012, stimulée par les dispositifs fiscaux de la loi Scellier, qui a orienté les choix des promoteurs vers d’autres options, faisant baisser la part de marché de l’électricité dans la construction neuve à 43 % en 2011. Les substitutions du mode de chauffage vers l’électricité ont crû fortement sur le parc de logements existants, au travers notamment de l’essor des pompes à chaleur, dont les ventes annuelles s’étaient envolées entre 2005 et 2008. Cette expansion rapide a été catalysée par la mise en place de crédits d’impôts et par la hausse continue du prix du baril de pétrole entre 2004 et l’été 2008. À partir de 2009, les effets conjugués de la crise économique et de la réduction progressive du crédit d’impôt se sont traduits par une contraction du volume des ventes. De même, des transferts d’usage sont également constatés sur la production d’eau chaude sanitaire (souvent corrélée au système de chauffage).
Alors que le bâtiment concentre à lui seul 70,6 millions de tonnes d'équivalent pétrole (70,6 Mtep), soit 43 % de l'énergie finale totale et qu’il est le deuxième poste d’émissions de gaz à effet de serre (GES), derrière le transport, avec 91 MtequivCO2 annuelles émises, soit 25 % des émissions nationales, le secteur se distingue par une consommation actuelle moyenne des bâtiments existants est de 240 kWhep/m2/an (mais certains consomment jusqu’à 400 ou 600 kWhep/m2/an) et celle des bâtiments neufs est entre 80 et 110 kWhep/m2/an.
Ainsi pour répondre à une amélioration de l’efficacité énergétique de nos bâtiments, l’instauration de la Réglementation Thermique 2012 (RT2012) donne pour objectif, tout comme les précédentes réglementations thermiques, de limiter les consommations énergétiques des bâtiments neufs qu’ils soient pour de l’habitation (résidentiel) ou pour tout autre usage (tertiaire). La réglementation thermique en vigueur est, par conséquent, renforcée afin que toutes les constructions neuves présentent, en moyenne, une consommation d’énergie primaire (avant transformation et transport) inférieure à 50 kWh/m²/an contre 150 kWh/m²/an environ avec la RT2005.
Cette profonde mutation réglementaire s’est particulièrement axée autour de cinq critères énergétiques : chauffage, climatisation, production d’eau chaude sanitaire, éclairage et auxiliaires (ventilation, pompes…).
Un bouleversement énergétique notamment qui supprime les exigences minimales au détriment d’exigences de performance énergétique globales qui sont uniquement exprimées en valeur absolue de consommation pour plus de clarté. Cette situation a donc entrainé une mutation du mode de production de chauffage au grand dam des électriciens.
Compréhensions :
Les résultats du bilan de RTE sur l’offre-demande d’électricité en France montre une chute inéluctable du chauffage électrique au profit d’autres modes de production.
Les bâtiments construits dans la période après 2008 ont été bâtis, dans une grande majorité, sur le principe du Label BBC, Basse Consommation, qui reprend en terme d’exigences les trois piliers de la RT 2012. Notamment que l’indicateur du besoin bioclimatique maximal soit supérieur à l’efficacité énergétique du bâti caractérisant l’impact de la conception propre du bâti sur la performance énergétique (chauffage, refroidissement et éclairage) en optimisant plus particulièrement des systèmes énergétiques a mettre œuvre, que la consommation énergétique en énergie primaire doit être à l’indicateur de la Consommation d’énergie primaire maximale (valeur moyenne = 50 kWhEP/(m2.an)), et enfin sur le confort d’été qui porte sur une exigence de la température intérieure la plus chaude atteinte au cours d’une séquence de 5 jours d’été chauds ne devant pas excéder la valeur limite caractérisé par la Température intérieure maximale.
Ces exigences accrues entrainent donc une difficulté majeure dans la production de chauffage électrique, en effet l’exigence de consommation est axée sur l’énergie primaire tenant compte de celle nécessaire à la production de l’énergie finale qui comptabilise les pertes d’énergie liées à la production, à la transformation, au transport et au stockage.
Ces pertes d’énergies sont prises en compte par des coefficients de conversion de l’énergie finale à appliquer :
Electricité : 1 kWh énergie finale = 2,58 kWh énergie primaire
Autres énergies : 1 kWh énergie finale = 1 kWh énergie primaire
Ces coefficients de conversion exercent ainsi une pression d’usage quant à l’électricité dans une construction neuve. En effet, la consommation d’énergie par l’utilisateur ne devra pas dépasser 19,3 kWh/m2.an puisque les radiateurs électriques rendent très difficile le passage sous ce seuil de consommation en raison d’un effet joule énergivore.
Ainsi, la prise en compte d’un facteur de conversion énergie finale – énergie primaire de 2,58 pour l’électricité dans la RT 2012 sanctionne le mode de production de chauffage électrique.
Ce transfert de mode production de chaleur constaté par RTE dans son bilan suit l’étude menée par BatiEtude qui explique cette baisse du chauffage électrique dans le résidentiel par une chute de la présence des convecteurs à effet joule dans les projets de logements collectifs », les pompes à chaleur (PAC) offrant un rapport chaleur produite sur électricité consommée largement plus intéressant, les modes de production de gaz se sont développés. « Mais l'offre des fabricants de PAC n'avait pas été, jusqu'à récemment, adaptée aux logements collectifs, constate Marc Remusat, les développeurs de projets résidentiels se sont donc massivement tournés vers les chaudières gaz».