L’écart se creuse entre les zones urbaines sensibles et le reste du territoire, inexorablement…
Le 9ème rapport de l’observatoire national des zones urbaines sensibles a livré, sans conteste, un état précis sur les quartiers de la politique de la ville, entre autres sur les zones urbaines sensibles (ZUS), dont la liste a été fixée par décret et qui bénéficient d’un certain nombre d’avantages, à travers aussi de ces deux ensembles que sont les zones de redynamisation urbaine (ZRU) et les zones franches urbaines (ZFU). Ce neuvième rapport montre que la situation précaire des personnes qui peuplent ces zones urbaines s’accroît, ainsi le taux de pauvreté est près de trois fois plus élevé en Zus que hors Zus.
Le rapport montre que les besoins sont beaucoup plus prégnants dans ces territoires, puisqu’en 2009, en France métropolitaine, le revenu fiscal moyen par unité de consommation de la population des Zus s’élève à 12 345 € annuels, soit à peine plus de la moitié (55%) de celui de leur unité urbaine. Ainsi en 2010, la part des personnes vivant sous le seuil de pauvreté (964 € mensuels) y est de 36,1%, un taux 2,9 fois plus élevé que celui de leurs agglomérations. Le concept de « pauvreté » prend en compte, au-delà du seul revenu fiscal, les effets redistributifs des impôts et des prestations sociales.
Ces ZUS qui se caractérise par la présence de grands ensembles ou de quartiers d’habitat dégradé et par un déséquilibre accentué entre l'habitat et l'emploi, sont au nombre de 751, représentent 4.7 millions d’habitants, soit environ 7.5% de la population française. Elles ne laissent que peu de perspectives aux forces vives de ces quartiers, c’est à dire les jeunes, en effet le rapport révèle que les besoins sont beaucoup pressants pour cette catégorie de population, en 2011, un jeune de moins de 18 ans sur trois y est couvert par la Couverture maladie universelle complémentaire, contre un sur six dans leurs unités urbaines environnantes ; en 2009-2010, près d’un jeune de moins de 18 ans sur deux (49 %) vivait en dessous du seuil de pauvreté dans ces quartiers.
Alors que les politiques de la ville devraient insuffler un contenant dynamique notamment par l’assimilation de ses forces vives, la situation de paupérisation, sous le joug de la crise économique actuelle, est constatée depuis bien des décennies et s’accélère sous le poids de l’austérité financière. Un constat plus prononcé puisque l’emploi recule entre 2010 et 2011 en Zus, le chômage augmente. Par rapport à 2010, la part de chômage a tendance à progresser et celle des actifs occupés à diminuer (respectivement + 0,5 point et - 0,7 point). Il en découle une augmentation sensible du taux de chômage, rapport du nombre de chômeurs au nombre d’actifs, qui passe de 21,9% en 2010 à 22,7 % en 2011. Les effets de la crise économique semblent malgré tout plus prononcés en Zus car, dans le même temps, le taux de chômage dans les autres quartiers des mêmes agglomérations (unités urbaines englobantes) est très stable depuis 2009, autour de 9,5%. Le taux de chômage en Zus est ainsi en 2011 près de deux fois et demi celui mesuré dans les unités urbaines englobantes.
En matière d’éducation, la part des enseignants à faible ancienneté (moins de deux ans) diminue entre la rentrée 2009 et la rentrée 2010 pour atteindre 31,1%. La part des jeunes enseignants (moins de 30 ans) suit la même tendance (17,9 % en 2010-2011). La dotation horaire (supérieure dans les collèges en Zus) et le nombre d’élèves par classe (inférieur en Zus) illustrent les efforts des pouvoirs publics en matière d’éducation prioritaire.
Toujours en matière d’éducation, les élèves issus de collèges en Zus restent plus souvent orientés vers la filière professionnelle que les autres collégiens hors Zus.
Enfin, plus de 2 millions de femmes vivent en 2006 dans les zones urbaines sensibles. Elles représentent 52 % de la population de ces quartiers, un taux proche de celui des unités urbaines. Les jeunes femmes résidant en Zus vivent plus sou- vent avec leurs parents, sont plus souvent chargées de famille et sont davantage en situation de monoparentalité. Elles sont également moins diplômées, peut-être en raison d’une responsabilité familiale plus précoce : à 25 ans, plus d’un quart des femmes ne vivant plus avec ses parents est déjà à la tête d’une famille avec enfant(s), en couple ou seule, contre seulement une sur dix dans les unités urbaines environnantes.
En 2006, plus d’une famille sur quatre en Zus est monoparentale contre moins d’une sur six dans les unités urbaines environnantes. Dans près de neuf cas sur dix, en Zus, c’est une femme qui est à la tête de la famille. Elle est en moyenne plus jeune et a en charge davantage d’enfants qu’une mère monoparente résidant dans les quartiers voisins.
Les femmes de 25 à 64 ans résidant en Zus sont, comme celle des quartiers environnants, moins actives que les hommes, mais l’écart entre les genres est deux fois plus important en Zus. Elles sont également plus nombreuses à être au chômage. Il en résulte, en 2011, un taux de chômage des femmes en Zus plus élevé que celui des hommes pour la première fois depuis cinq ans. Moins d’une femme de Zus sur deux, âgée de 25 à 64 ans, est ainsi en emploi. Les femmes salariées résidant en Zus occupent en général un emploi ayant un statut moins élevé que ce que l’on observe dans les quartiers environnants, du fait notamment d’un niveau de diplôme plus faible. Elles sont plus fréquemment titulaires d’un contrat à durée déterminée ou employées à temps partiel que les femmes du même âge résidant dans les unités urbaines en dehors des Zus.
Alors quelles sont les politiques mises en œuvre pour favoriser une cohésion entre les Zus et les hors Zus… ?
En matière de rénovation, et du programme national de rénovation urbaine, son montant total programmé s’élève à 44,4 milliards d’euros au 31 décembre 2011, dont 26,4% subventionnés par l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru). La programmation nationale (2004-2013) prévoit au total 140 300 démolitions de logements et la reconstruction 135700 logements, dont respectivement 94700 démolitions et 73 000 constructions réalisées à la fin 2011. 73 000 logements ont effectivement été démolis et 39 7000 construits à cette date.
Les deux tiers du PNRU toujours consacrés au logement social :
Les opérations portant sur le logement social représentent, avec 29,0 milliards d’euros, près des deux tiers des montants programmés sur 2004-2013 et plus de 60 % des subventions de l’Anru.
Les engagements financiers sont pris à hauteur de 69,2 % des travaux prévus :
Au 31 décembre 2011, le montant des travaux engagés s’établit à 30,75 milliards d’euros sur les 44,40 milliards programmés pour la période 2004- 2013. Le taux d’engagement s’établit donc à 69,2 %.
Les taux d’engagement des subventions Anru sont un peu plus élevés que ceux des crédits globaux du PNRU : 71,0%.
Une poursuite du rattrapage des engagements financiers :
Les crédits engagés au cours de l’année restent en 2011, comme en 2009 et 2010, supérieurs à ceux programmés que ce soit pour l’ensemble des travaux engagés ou pour les subventions Anru : de 8,7% pour les travaux et 9,3% pour les subventions. La poursuite de ce rattrapage porte les taux d’engagements cumulés sur 2004- 2011 à 73,4 % pour le programme et 76,0 % pour les subventions. Les engagements financiers cumulés restent en deçà de la programmation 2004-2013 et l’infléchissement de 2010 par rapport à l’accélération de 2009 se confirme en 2011.
Enfin, la DSU et la politique de la ville : deux dispositifs convergents malgré des cibles de nature différente :
Instaurée en 1991, la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale (DSU) est un dispositif de péréquation verticale visant à améliorer les conditions de vie dans les communes urbaines confrontées à une insuffisance de leurs ressources et supportant des charges élevées. Ce dispositif a connu deux évolutions majeures au cours des dix dernières années. La première est due à la loi de programmation de cohésion sociale de 2005 (dite loi Borloo) qui opère un rapprochement entre la DSU et la politique de la ville en intégrant des coefficients majorant le montant de dotation perçu par les communes possédant une Zus ou une ZFU sur leur territoire. La seconde évolution majeure a eu lieu en 2009, quand la loi de finances a créé le dispositif de la DSU-cible, et des mécanismes de garantie de la dotation en niveau ou en valeur pour l’ensemble des communes bénéficiaires. Avec cette évolution, le lien entre la DSU et le champ de la politique de la ville a été fortement détendu, les coefficients majorateurs Zus et ZFU ne s’appliquant désormais plus que pour les communes nouvellement éligibles à la dotation.
En tant que dotation destinée à l’ensemble des communes urbaines en difficulté, la DSU concerne naturellement les communes situées dans le champ de la politique de la ville, et ce quel que soit le type de géographie prioritaire considérée : réglementaire ou contractuelle.
Ainsi, en 2012, plus de 80 % des volumes financiers de la DSU bénéficient à des communes comportant des Zus et/ou ZFU et pour plus de 90 % à des communes comportant des quartiers concernés par un Cucs. En termes de progression sur la période 2004-2012, le montant de la DSU attribué aux communes comportant des Zus et/ou ZFU connaît une croissance de 130,6 % soit un taux de progression annuel moyen d’environ 11% qui traduit l’engagement de la loi de cohésion sociale de 2005 d’augmenter « à concurrence de 120 millions d’euros [...] la dotation de solidarité urbaine et de cohésion sociale » chaque année entre 2005 et 2009. L’introduction des coefficients multiplicateurs Zus et ZFU par cette même loi explique que la progression des dotations soit supérieure pour les communes comportant ce type de quartiers.
Réciproquement, on constate que la plupart des communes concernées par la politique de la ville, que ce soit au titre de la géographie réglementaire ou au titre de la géographie contractuelle, sont bénéficiaires de la DSU. Ainsi, la couverture par la DSU des communes de 10000 habitants et plus avec des Zus et/ou ZFU est quasi-totale : plus de 95% des communes de 10000 habitants et plus avec des Zus et/ou ZFU bénéficient de la DSU. En ce qui concerne les communes Cucs de plus de 10 000 habitants, ce sont également plus de 90 % d’entre elles qui bénéficient de la DSU. Parmi les 5 % de communes de plus de 10 000 habitants avec Zus et/ou ZFU qui sont non attributaires de la DSU, la plupart sont des communes atypiques : c’est le cas de grandes villes telles que Paris, Bordeaux, Lyon (jusqu’en 2008) ou encore Nice.
Si l’on constate dans les faits une forte convergence des deux dispositifs, il faut cependant souligner la différence fondamentale de leur objet. Alors que la DSU vise l’ensemble des communes urbaines connaissant des difficultés financières, sans restriction, la politique de la ville s’attache à traiter des quartiers où se concentrent des difficultés sociales, quel que soit le statut de la commune où ils se trouvent.