Un parc naturel marin des estuaires picards et de la
mer d’Opale
Après plus de deux ans de concertation et une enquête publique qui s’est déroulée entre août et octobre 2011, le Parc naturel marin des estuaires picards et de la mer d’Opale, premier parc de la façade maritime Manche mer du Nord a vu le jour le 11 décembre 2012 par décret du ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie. Le décret définit le périmètre du parc, la composition de son conseil de gestion et les orientations de gestion, élaborés en concertation avec les acteurs de la mer afin de répondre aux enjeux de connaissance, de protection du milieu marin et de développement durable des activités maritimes qui constituent les trois finalités d’un parc naturel marin.
Le nouveau parc couvre 2 300 km2 d’espace marin et compte environ 118 km de côtes.
Le Parc naturel marin des estuaires picards et de la mer d’Opale est le premier parc naturel marin créé en Manche. Il est le cinquième parc naturel marin après celui de l’Iroise (2007), ceux de Mayotte (2010), du golfe du Lion (2011) et des Glorieuses (2012).
Il contribue au réseau des aires marines protégées qui permet d’améliorer la protection du milieu marin et de freiner la perte de biodiversité, engagement international de la France (Convention de la diversité biologique, Rio 1992). L’Agence des aires marines protégées a notamment pour mission la mise en place d'un réseau national cohérent des aires marines protégées et son animation.
Ce réseau a bien avancé : désignation et mise en gestion des sites Natura 2000 en mer ; le Parc national de Guadeloupe a été étendu en 2009 et comprend désormais une partie marine significative, ; le Parc national des Calanques a été créé en avril 2012, le parc national de Port-Cros a été également étendu en mer en mai 2012; ; la dynamique de création des parcs naturels marins se poursuit également avec le lancement d’une mission d’étude en Martinique, et deux autres projets en cours (estuaires de la Gironde et des Pertuis, bassin d’Arcachon) La stratégie nationale de création et de gestion des aires marines protégées, révisée en avril 2012, a pour objectif d’étendre la politique de développement du réseau d’aires marines protégées à l’outre-mer dont les eaux représentent 97% des eaux sous juridictions françaises. Cette nouvelle stratégie a également pour ambition de renforcer le réseau des réserves naturelles nationales et de mettre en place des réserves à vocation halieutique.
En octobre 2012, en métropole, les aires marines protégées représentent 23,2% des eaux françaises, et 1,6% en outre-mer.
Crédits photos :
Laurent Mignaux/MEDDE, Yves Gladu/Agence des aires marines protégées
Le périmètre du parc naturel marin : une gestion cohérente
Le périmètre retenu permet de prendre en compte l’essentiel des enjeux de protection de la zone. Il prend en considération les interactions entre les différents écosystèmes et les activités présentes, mais aussi celles en développement pour l'avenir.
Le périmètre comprend en particulier :
· les estuaires et les hauts fonds s'étirant en bancs de sable mobiles au large des côtes. Ce sont des zones de très haute importance pour la reproduction, la croissance ainsi que pour les haltes migratoires de bon nombre d'espèces de poissons, oiseaux et mammifères marins.
· il englobe les parties marines des espaces protégés existants (sites d’intérêt communautaire, réserves naturelles nationales de la Baie de la Somme et de la baie de Canche), et est connecté avec des espaces protégés : sites Natura 2000 en mer, espaces littoraux (terrains du Conservatoire du littoral, Parc naturel régional Cap et Marais d’Opale...) ou en voie de création (parc naturel régional de Picardie maritime). La gestion du Parc se fera en cohérence avec ces espaces protégés.
· il inclut le fleuve marin côtier (masse d’eau dessalée dérivant le long de la côte, vers le nord, alimentée par le panache de la Seine et des sept estuaires et contribuant à la qualité de l'eau marine, enjeu majeur identifié par les acteurs marins).
Le Parc naturel marin des estuaires picards et de la mer d’Opale comprend huit orientations de gestion définies avec l’ensemble des acteurs pour répondre aux principaux enjeux
· Mieux connaitre le milieu marin et partager cette connaissance ;
· Protéger les écosystèmes et le patrimoine naturel marins ;
· Contribuer au bon état écologique des eaux marines ;
· Mieux connaître, faire connaître, et aussi préserver les paysages marins et sous-marins, les biens culturels ;
· Coordonner de manière partenariale la gestion des espaces protégés en mer ou contigus à la mer ;
· Développer de manière durable les différentes pêches, activités essentielles à l'économie locale ;
· Développer de manière durable les activités économiques actuelles (le tourisme, les sports et loisirs en mer...), ou futures, en restant ouvert à l'innovation et à de nouveaux usages ;
· Coopérer avec les pays voisins pour la protection et la gestion d'un espace marin commun.
C’est dans le cadre de ces orientations de gestion que le conseil de gestion va devoir élaborer, dans les trois ans à venir, le plan de gestion du Parc qui fixera les objectifs à long terme (15 ans maximum). Ce plan de gestion sera le guide pour préparer les programmes annuels. En attendant, l’élaboration de ce plan, des actions pourront être mises en œuvre dès lors qu’elles s’inscrivent dans le cadre des orientations de gestion fixées par le décret de création.
L’une des particularités d’un parc naturel marin porte sur son mode de gouvernance. Véritable parlement de la mer, le conseil de gestion est composé d’acteurs locaux concernés par le milieu marin.
Le conseil de gestion du Parc naturel marin des estuaires picards et mer d’Opale compte 60 membres. Sa composition résulte des volontés exprimées pendant la concertation autour du projet, en veillant à ce que sa taille permette la prise de décision. Résolument marin, ce conseil de gestion :
· accorde une place privilégiée aux pêcheurs professionnels tout en représentant la diversité des activités traditionnelles, professionnelles et de loisirs ;
· implique étroitement les collectivités territoriales ;
· intègre également les nouveaux usages économiques ;
· comprend la représentation d'associations œuvrant pour la protection de l'environnement et du cadre de vie ;
· associe des experts compétents pour le milieu marin
Le décret de création fixe la composition du conseil de gestion comme suit :
- Six représentants de l’Etat
- Treize représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements
- Un représentant du ou des parcs naturels régionaux intéressés
- Un représentant de l’organisme de gestion d’une aire marine protégée contiguë
- Vingt-deux représentants des organisations représentatives des professionnels (dont 14 appartenant au monde de la pêche professionnelle)
- Sept représentants des organisations d’usagers (plongée, chasse maritime, pêche de loisirs, plaisance, sports...)
- Six représentants d’associations de protection de l’environnement
- Quatre personnalités qualifiées.
© Laurent Mignaux / MEDDE
Les enjeux : un carrefour biologique et économique original
A la rencontre de deux mers, alimenté par sept fleuves, ce secteur constitue un véritable carrefour biologique. Il abrite des écosystèmes riches et variés et joue un rôle majeur de frayères et de nourriceries essentielles pour la biodiversité et les ressources halieutiques. Une mosaïque de milieux interdépendants (bancs de sable, hauts-fonds rocheux, estuaires, vastes plages, vasières...) favorise les cycles de vie d'espèces diversifiées et remarquables.
La présence d’un fleuve marin, né de la rencontre des fleuves côtiers et de la mer, les importants transferts sédimentaires, de vastes estuaires découverts à marée basse et un large estran marqué par le fort balancement des marées constituent quelques unes des caractéristiques de cet espace marin d’exception. Cela explique la grande variété du patrimoine naturel (végétaux, invertébrés, poissons, oiseaux, mammifères marins, dont de nombreuses espèces migratrices), et la haute productivité de ces habitats. Cette richesse a d'ailleurs motivé de longue date la protection des espaces remarquables en mer et sur le littoral.
Ce carrefour biologique soutient une économie maritime d’une grande importance. Il est le lieu de forts enjeux sur le plan local (activités de loisirs, tourisme attiré par des espaces préservés, cadre de vie, patrimoine culturel maritime...), national (pêche professionnelle, activités portuaires) et même international (trafic maritime, sécurité en mer). Plus récemment, cet espace marin s'avère propice pour de nouveaux usages en mer : énergies marines, extraction de granulats marins,…