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Une brève histoire des lignes --

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Une-bre-ve-histoire-des-lignes---.jpgUne brève histoire des lignes --

Du 11 janvier au 1er avril 2013 au Centre Pompidou à Metz

L'exposition Une brève histoire des lignes propose un point de vue original sur la pratique du dessin et du tracé de 1925 à nos jours. Élargissant la définition stricte du dessin, elle explore la manière dont les lignes s’inscrivent dans notre quotidien et notre environnement. Qu’elles soient pérennes ou éphémères, physiques ou métaphoriques, elles sont omniprésentes : dans le geste de l’écriture, les sillons du paysage ou encore le sillage laissé par nos gestes et trajectoires.

L’exposition s’inspire librement de l’ouvrage éponyme de l’anthropologue Tim Ingold, qui part du postulat qu’une « étude des hommes et des choses est une étude des lignes dont ils sont faits ». Marcher, écrire ou tisser participent selon lui d’une « fabrique de lignes ».

Une brève histoire des lignes, dont elle a repris le titre avec l’aimable autorisation de son auteur et de son éditeur. Selon l’auteur, « où qu’ils aillent et quoi qu’ils fassent, les hommes tracent des lignes : marcher, écrire, dessiner ou tisser sont des activités où les lignes sont omniprésentes, au même titre que l’usage de la voix, des mains ou des pieds ». Dans Une brève histoire des lignes, l’anthropologue anglais Tim Ingold pose les fondements de ce que pourrait être une « anthropologie comparée de la ligne » - et, au-delà, une véritable anthropologie du graphisme. Etayé par de nombreux cas de figure (des pistes chantées aborigènes australiens aux routes romaines, de la calligraphie chinoise à l’alphabet imprimé, des tissus amérindiens

à l’architecture contemporaine), l’ouvrage analyse la production et l’existence des lignes dans l’activité humaine quotidienne. Tim Ingold divise ces lignes en deux genres – les traces et les fils – avant de montrer que l’un et l’autre peuvent fusionner ou se transformer en surfaces et en motifs. Selon lui, l’Occident a progressivement changé le cours de la ligne, celle-

ci perdant peu à peu le lien qui l’unissait au geste et à sa trace pour tendre finalement vers l’idéal de la modernité : la ligne droite. Cet ouvrage s’adresse autant à ceux qui tracent des lignes en travaillant (typographes, architectes, musiciens, cartographes) qu’aux calligraphes et aux marcheurs – eux qui n’en finissent jamais de tracer des lignes car « quel que soit l’endroit où l’on va, on peut toujours aller plus loin. »

Prolongeant cette quête, l’exposition suit la piste d’une ligne dessinée ou imaginée, investissant l’échelle de la feuille, du mur, du corps ou du paysage. À travers cette relecture anthropomorphique du dessin, elle tente de dégager un certain rapport spirituel et poétique entre la ligne et le monde.

Fondée sur les collections du Centre Pompidou, Musée national d’art moderne, l’exposition s’articule autour d’un ensemble important d’œuvres du Cabinet d’art graphique, complété par des prêts du Cabinet de la photographie, des collections arts plastiques, architecture, cinéma et nouveaux médias ainsi que de la Bibliothèque Kandinsky.

Une sélection de 220 œuvres est présentée en Galerie 1 sur une superficie de 1 200 m2. Près de 80 artistes sont représentés, notamment Dove Allouche, Pierrette Bloch, John Cage, Marcel Duchamp, Vassily Kandinsky, Vera Molnár, Giuseppe Penone.

Une brève histoire des lignes4Julius Koller, Time-Space Defining Psycho- Physical Activity of Material - Tennis (Antihappen- ing), 1968Épreuve gélation-argentique, 18,7 × 18 cm Centre Pompidou, Musée national d'art moderne © Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMN - © Philippe Migeat © Julius Koller

1 - une typologie des lignes

La ligne, qui compte parmi les principales composantes de la création artistique, a souvent fait l’objet de typologies de la part des artistes. Ainsi, dans les années 1920, les professeurs du Bauhaus ont cherché à la catégoriser selon des critères objectifs : lignes droites, découlant de la plus stricte géométrie, ou lignes déterminées par les libres fantaisies de la main, toutes se révèlent de puissants moyens d’expression. Si les tenants de l’Art minimal et conceptuel font de la ligne pure l’une des constantes de leur vocabulaire, ceux de l’Abstraction gestuelle, sous l’influence notamment de la pensée extrême-orientale, font de la trajectoire du trait un véritable sismographe du corps. Tirée au cordeau ou tourbillonnante, isolée ou foisonnante, la ligne, dans ses métamorphoses, est intimement liée à ses modes de production.

Vassily Kandinsky

Dessins pour Punkt und Linie zu Fläche [Point et ligne sur plan], 1925 Encre de Chine sur papier

Ces dessins ont tous été conçus pour ce deuxième ouvrage théorique de Vassily Kandinsky. Paru à Munich en 1926, ce livre très illustré, qui reflète l’enseignement de l’artiste au Bauhaus depuis 1922, répond à la nécessité de soumettre la peinture abstraite à un examen purement scientifique de ses composants. En s’appuyant sur les théories de la perception et la psychologie de la forme, mais aussi sur des exemples pris dans le domaine des sciences naturelles et de la technologie, Kandinsky propose notamment dans le deuxième chapitre un répertoire de lignes plus ou moins complexes, considérées comme « traces du point en mouvement » soumises à des « forces extérieures ».

Une brève histoire des lignes5Vassily Kandinsky, Empreinte des mains de l'artiste, 1926Aquarelle sur papier Centre Pompidou, Musée national d'art moderne © Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMN - © Philippe Migeat © ADAGP, Paris 2013

Lee Ufan

Série From Line, 1964-1982 Crayon gras sur papier

Installé au Japon depuis 1956, le Coréen Lee Ufan développe une pratique artistique marquée par un minimalisme gestuel radical. La série From line explore les potentialités plastiques de la ligne libre, dessinée et démultipliée avec un simple crayon gras. Il ne s'agit pas pour l'artiste d'exprimer un quelconque état d'âme mais plutôt, dans une démarche marquée par les spiritualités orientales, de trouver un équilibre entre les traits et le vide, qu'il préfère appeler "réserve".

Lawrence Weiner

A Question of Balance [Une question d'équilibre], 1981 Stylo-bille sur papier

Exercice rare dans le travail de l’artiste conceptuel américain, le dessin est ici traité comme pictogramme, sorte de notation visuelle qui représente une idée complétée par son énoncé linguistique. L’équilibre est ici questionné à travers treize hypothèses graphiques. À l’intérieur d’un carré qui détermine deux espaces différenciés, droites et tangentes se croisent en conjuguant l’affirmation des lignes droites à la virtualité des lignes pointillées.

2 - la geste cheminatoire

Cette expression du philosophe et historien Michel de Certeau décrivant, dans L’Invention du quotidien (1980),

l’acte de la marche et son interaction avec toutes les données, événements et rencontres qu’occasionne un parcours, introduit cette section où la ligne produite et son mouvement ne font qu’un. En promenade sur la feuille de dessin ou la bobine de film, celle-ci laisse dans son sillage la trace de son passage. À la fois trajectoire et processus, elle construit au fur et à mesure de sa traversée un dessin : c’est le déplacement physique continu d’une ligne qui construit le motif dans les allers retours de la main, esquisse des méandres que l’on parcourt du regard, ou délie et recompose des sillons pour évoquer une marche dans laquelle le voyageur et sa ligne ne sont qu’une seule et même chose.

Léon Ferrari

Caminos, 1982 Héliographie sur papier

De 1980 à 1986, Léon Ferrari réalise vingt-sept héliographies désignées sous le nom d’ « architectures de la folie ». Réfugié au Brésil après avoir fui la dictature de l’Argentine, il conçoit ces plans de ville où l’organisation rationnelle poussée jusqu’à l’absurde aboutit à des espaces labyrinthiques. Dans Caminos, les petits personnages, vus d’en haut, comme soumis à une surveillance permanente, suivent la trajectoire d’une ligne serpentine. Ils semblent condamnés à obéir aux desseins de cette ligne qui anticipe leur parcours.

Une brève histoire des lignesLéon Ferrari, Caminos, 1982Héliographie sur papier, 68,7 × 993,8 cm Centre Pompidou, Musée national d'art moderne © Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMN - © Philippe Migeat © Léon Ferrari - Cortesía Fundación Augusto y León Ferrari. Arte y Acervo

Olafur Eliasson

Pedestrian Vibes Studies [Études des vibrations du marcheur], 2004 Photogravures

Les sculptures et environnements d’Olafur Eliasson participent d’une physique expérimentale fascinante, où l’optique tient une place de choix. Études de l’homme en marche, ces ondulations blanches traduisent, comme des oscillogrammes, les démarches d’individus équipés de diodes lumineuses et photographiés dans l’obscurité avec un long temps de pause. L’œuvre semble un hommage inversé aux chronophotographies du XIXe siècle, qui captèrent, grâce à un temps de pause très rapide, la décomposition du mouvement, image par image.

3 - tracés cartographiques et pratiques de savoir

Telles les cartes médiévales qui compilaient les expériences rencontrées sur un chemin, les étapes à effectuer et les temps de marche, les œuvres de cette section de l’exposition offrent des « descripteurs d’itinéraires » (Michel de Certeau). Proposant une alternative aux plans abstraits et conventionnels, ces croquis cartographiques sont des relevés d’actions, nés d’une expérience ou d’un parcours. Ils sont le fruit de cheminements, de l’enregistrement de flux ou de directions. Les traces dessinées sont les lignes flottantes d’une géographie mouvante et subjective ; des histoires illustrées qui font surgir un territoire vécu. Par ces jeux de lignes, « une ville transhumante, ou métaphorique, s’insinue (...) dans le texte clair de la ville planifiée et lisible. » (Michel de Certeau). Ces œuvres peuvent naître de motivations poétiques, politiques, exploratoires, militantes ou subversives.

Etienne-Martin

Sans titre, 1972-1992 Feutres de couleur et encre sur papier

Au début des années 1960, le sculpteur Etienne-Martin abandonne le dessin d’étude au profit de « schémas », où il réorganise l’ensemble de son œuvre en fonction de paramètres définis par le plan de sa maison natale. Sur le papier où se mêlent croquis et écritures, la topographie et l’orientation de cette maison déterminent une déambulation dans le temps et dans l’espace. Respectant un code couleur librement élaboré par l’artiste, la ligne fléchée en traduit la complexe organisation. La signification de cette cartographie intime où s’enchevêtrent souvenirs et mythologie personnelle demeure cependant mystérieuse.

Shusaku Arakawa

Sans titre, 1988 Mine graphite et pastel sur papier gouaché

Dans ces trois études pour le rideau de scène de l’Opéra Bastille (finalement réalisé par l’Américain Cy Twombly), tentent de se combiner deux tracés d’espace : la carte du quartier de Paris où est construit le nouveau théâtre, ses rues désordonnées, le mystère de sa circulation, et le dessin de deux labyrinthes, l’un circulaire, l’autre carré, signe d’une errance organisée en jeu. Viennent s’y ajouter des signes d’un autre ordre, un fléchage qui pour- rait donner un sens aux lieux dessinés mais qui n’ajoute qu’à l’ambiguïté.

Till Roeskens

Vidéocartographies : Aida, Palestine, 2009 Betacam numérique PAL, noir et blanc, son

« J’ai demandé aux habitants du camp Aïda à Bethléem d’esquisser des cartes de ce qui les entoure. Les dessins en train de se faire ont été [enregistrés], de même que les récits qui animent ces géographies subjectives. (...) Vous découvrirez pas à pas le camp de réfugiés et ses environs, (...) et leurs tentatives de composer avec l’état de siège sous lequel ils vivent ». Le travail de Roeskens se développe dans cette rencontre avec un territoire et ses habitants, co-auteurs de ses œuvres. La ligne ici devient topographie, relevé de parcours, trace d’une existence qui se tisse dans une « résistance par contournement ».

4 - l'espace / la mesure

La première définition du mot géométrie est littéralement « la mesure de la terre », soit une mathématique appliquée à un territoire ; un usage de la ligne, tendue entre deux points, pour le mesurer, le circonscrire, l’occuper et in fine se l’approprier. Cette section de l’exposition réunit des artistes qui envisagent différentes manières de délimiter un espace ou de le redessiner, de manière non autoritaire, par le biais du crayon, de matériaux trouvés sur place ou de leur propre déplacement. L’espace – celui de la page, de la nature ou de l’atelier - se définit dans leurs œuvres par l’échelle de leur corps, leurs trajectoires et mouvements et non plus dans la fixité d’une limite. Dès lors, le corps devient un étalon de la mesure de l’environnement soulignant la relativité des normes et ouvrant de possibles alternatives scientifico-poétiques au système métrique.

Klaus Rinke

Boden, Wand, Ecke, Raum, 1970 Épreuves gélatino-argentiques (tirages 2002)

Mesurer le corps aux données physiques du monde est une préoccupation centrale de Rinke qui utilise dès 1960 la photographie pour fixer l’image de son corps confronté à la nature. Avec Boden, Wand, Ecke, Raum, il décline, dans l’atelier, diverses postures combinées tour à tour avec le mur, l’angle, le sol. A la fois performance, propos sur la sculpture et travail photographique rigoureusement composé, cet alphabet primordial déploie un système de mesure à l’échelle du corps de l’artiste, un jeu de combinatoires de son inscription dans l’environnement.

Alighiero e Boetti

Ciò che sempre parla in silenzio è il corpo [Ce qui parle toujours en silence, c'est le corps], 1974 Mine graphite sur carton

Cette œuvre de l’un des acteurs majeurs de l’Arte Povera se présente comme une longue bande de papier cartonné, sur la moitié droite de laquelle on peut lire en italien : « Ce qui parle toujours en silence, c’est le corps ». La même phrase, à l’envers et tremblée, comme reflétée par un miroir légèrement déformant, se déploie sur la moitié gauche. L’artiste utilise simultanément ses deux mains jusqu’à ce que l’écartement maximum de ses bras le force à s’interrompre, et écrit dans un seul et même mouvement les mots et leur reflet inversé.

 

Une brève histoire des lignes5Markus Raetz, Sans titre, 1981, 41 morceaux de bois de bruyère et 10 morceaux de tuyaux de cuivre fixés au mur, 180 × 170 cm Achat à la Galerie Farideh-Cadot en 1982 Centre Pompidou, Musée national d'art moderne © Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMN - © Philippe Migeat © ADAGP, Paris 2013

 

5 - les lignes fantômes

De la courbe souple d’une branche aux contours d’un paysage creusés par l’érosion, de la dune façonnée par le vent aux sillons dessinés par l’homme dans la terre, cette section de l’exposition manifeste l’omniprésence des lignes dans la nature. De nombreux artistes – de l’École de Paris à l’art minimal - ont souligné cet aspect en proposant une traduction du paysage épuré jusqu’à l’abstraction. Dans leurs œuvres, ravines, mouvements géologiques ou contours sinueux des collines sont ramenés à leur essence ou à leur flux vital. À partir des années 1960, des artistes quittent l’atelier pour travailler à l’échelle de la nature, inventant de nouvelles formes. Certains tissent des lignes dans le paysage, témoignant par la photographie des traces invisibles ou réversibles de leur arpentage solitaire tandis que d’autres assument une position démiurgique, ajoutant de nouvelles lignes éphémères à celles de l’ordre naturel.

Eleanor Antin

100 Boots, 1971-1973 Impression photomécanique sur papier carte

Ces cinquante-et-une cartes postales documentent les pérégrinations de bottes sillonnant les États-Unis, suivant des tracés parfois rectilignes, parfois sinueux. Encerclant un feu de camp ou marchant sur la ville, ces chaussures dessinent des formations aux allures tour à tour pittoresques et épiques. Eleanor Antin poste à divers destinataires les étapes de cette épopée fictive, avant d’en exposer la totalité au Musée d’Art Moderne de New-York en 1973. Réalisée et diffusée hors du musée, la série témoigne de la tentative de l’art conceptuel de s’extraire du cadre de l’institution.

Christo et Jeanne-Claude

Running Fence, Sonoma and Marin Counties, California, 1972-1976 Épreuve couleur Photographié par Jeanne-Claude (2) et Wolfgang Volz (1, 3 et 4)

Cette intervention de Christo et Jeanne-Claude, célèbres pour leurs « empaquetages » de monuments et de sites naturels, a nécessité quatre ans de préparation. La ligne de voiles, haute de 5,5 mètres, épouse sur plus de 40 kilomètres les reliefs vallonnés du nord de San Francisco, traversant routes et villages. Cette réalisation grandiose, restée en place seulement trois semaines, en impose par sa complexité technique et par sa démesure. Elle relève tout autant d’un concept architectural que d’une appréhension lyrique de la nature.

Barbara et Michael Leisgen

La Naissance du soleil, 1973-1974 Épreuves gélatino-argentiques collées sur carton, dessin et texte manuscrit à la mine graphite sur papier

S’inscrivant dans la tradition du Romantisme, les travaux des deux artistes allemands dénotent un intérêt pour la Nature comme un organisme vivant, spirituel et doué d’autonomie. Influencés, notamment, par Novalis pour qui « notre corps fait partie du monde. Mieux, il en est un membre, à la fois autonome et analogue à l’univers », ils cherchent moins à reproduire la nature qu’à faire corps avec elle. Fixé par la photographie, le corps de l’artiste s’inscrit de manière éphémère dans le paysage qu’il semble engendrer en commandant la course du soleil.

Dove Allouche

Le diamant d'une étoile a rayé le fond du ciel, 2011 Mine graphite et encre sur papier

Procédé photographique ancien, la stéréoscopie s’inspire du fonctionnement de la vision binoculaire : pour générer l’illusion d’un relief, elle fusionne deux angles de vue dont l’espacement reprend l’écartement des yeux. Imperceptiblement désaxées, ces deux images ont donc saisi la foudre simultanément, sans en rendre néanmoins la perspective. L’éclair nocturne apparait ici en réserve d’un dessin fait au graphite, clair-obscur patiemment accumulé par Dove Allouche, passé virtuose dans la reproduction manuelle d’une technique pourtant pionnière en matière de reproductibilité.

Une brève histoire des lignes1Dove Allouche, Le diamant d'une étoile a rayé le fond du ciel, 2011Mine graphite et encre sur papier Centre Pompidou, Musée national d'art moderne © Dove Allouche

6 - écritures

Manuscrite ou imprimée, l’écriture est toute entière constituée de lignes, jeux de pleins et de déliés, tout en étant elle-même, à l’échelle d’un texte, génératrice de lignes qui courent de part et d’autre de la page. Ces deux dimensions de l’écriture se révèlent une source d’inspiration féconde pour les artistes présents dans cette section de l’exposition. Lettres ou chiffres, à la lisibilité souvent compromise, envahissent ainsi l’espace de la feuille, de la toile ou même du mur, substituant à leur vocation première de message signifiant la dimension esthétique d’un langage purement visuel. D’autres œuvres, quand elles ne créent pas des langues inventées, remplacent les caractères par des signes abstraits, voire par des motifs minimaux incessamment répétés, tout en conservant les alignements du texte ou de la partition musicale.

Henri Michaux

Dessin mescalinien, 1958 Encre de Chine sur papier

Poète et écrivain, Henri Michaux prolonge par le dessin son exploration de « l’espace du dedans » et parachève sa « connaissance par les gouffres ». Parallèlement aux dessins faits sous l’emprise de la mescaline à la fin des années 50, ses peintures à l’encre expérimentent la vitesse d’exécution, déjà présente dans les Mouvements de 1950. Les multitudes de signes d’encre sont autant d’irruptions rageuses d’un alphabet abstrait, né d’une immédiateté du geste, parfois aligné en écritures musicales, d’où semblent surgir d’inquiétants motifs tachistes.

Guy de Cointet

The distinction between t and t' is not always clear, 1971 Encre de Chine sur papier Back in Jamaica [Retour en Jamaïque],1983

Encres de couleur sur papier

D’origine française, Guy de Cointet émigre aux États-Unis à la fin des années 1960. Son intérêt pour le langage codé – marqué par l’œuvre de Raymond Roussel et de Stéphane Mallarmé – se manifeste dans l’explora- tion d’une écriture dessinée, à l’image des hiéroglyphes et des idéogrammes. Investissant la page, le langage est révélé dans toutes ses possibilités d’abstraction. Les titres des œuvres offrent des clés d’interprétation qui demeurent pourtant incertaines et préservent leur énigme sous-jacente.

Vera Molnár

OTTWW, 1981-2010 Fil noir, clous peints en noir

Vera Molnár aime soumettre des formes élémentaires à une règle extérieure – le hasard, une formule mathématique ou un programme informatique – les ouvrant à d’infinies variations. L'œuvre OTTWW, hommage au célèbre poème de Shelley, Ode to the West Wind [Ode au vent d’ouest], résulte d’un algorithme créé par l’artiste. Les formes issues de cette figure mathéma- tique sont reproduites sur le mur à l’aide d’un fil de coton noir maintenu par de petits clous. Les lignes, répétées en une frise continue, se déploient librement comme emportées par le souffle du vent.

Une brève histoire des lignes2Vera Molnár, OTTWW, 1981-2010Fil noir, clous peints en noir Centre Pompidou, Musée national d'art moderne © Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMN - © Philippe Migeat © ADAGP, Paris 2013

7 - lignes de Vie

Tout comme le végétal, traversé de nervures et d’alvéoles, le corps humain est constitué de lignes innombrables, à commencer par le réseau interne des veines et des artères. Véritable « carte visuelle de l’existence », la paume de la main en comporte de nombreuses dont la chiromancie s’ingénie traditionnellement à décrypter le sens. Dans cette dernière section de l’exposition, tout un jeu de correspondances entre microcosme et macrocosme se met ainsi en place et se reflète dans le format de certaines œuvres, agrandissant démesurément un détail corporel ou proposant au contraire une cartographie réduite de l’individu. Si l’espérance de vie peut se lire au creux de la main, l’existence, à son terme, dans sa fragilité, ne tient plus qu’à un fil, métaphore ultime de la ligne.

Man Ray

Lignes de la main redessinées pour l'Etoile de mer, 1928 Épreuve gélatino-argentique d’après le négatif au gélatino bromure d’argent sur support souple original

En marge d’une pratique picturale à laquelle il se destine, Man Ray s’initie à la photographie dès 1915. Entre le New-York « dada » et le Paris sur- réaliste, il perfectionne alors des procédés comme le photogramme ou la solarisation. Ces mains noires aux lignes blanches résultent par exemple d’une inversion de valeurs propre au tirage négatif. L’image provient du film surréaliste L’Étoile de mer (1928) réalisé par l’artiste d’après un poème de Robert Desnos. Un amant éconduit y scrute un futur incertain dans les lignes de ses mains, repassées à l’encre noire.

Giuseppe Penone

Palpebra [Paupière], 1989 Fusain fixé sur toile préparée à l’acrylique

L’œuvre de Penone relève pour l’essentiel d’une pratique de l’empreinte et d’une tentative de rendre visibles des processus organiques naturels. En 1976, il prend l’empreinte de ses paupières sur des papiers de soie. En 1978, il agrandit par projection cette empreinte et reporte au fusain la trame de ce paysage intérieur sur des feuilles de papier collées au mur. Ces paupières de géant révèlent une sorte d’espace cosmique, à la fois végétal, minéral et fluide. Au flux organique de cette prolifération répond l’énergie des lignes charbonneuses du fusain.

Gabriel Orozco

Sans titre, 1995 Mine graphite sur papier calque

En 1995, pendant son séjour à Berlin, Orozco crée des sculptures et des dessins fondés sur sa main qui devient outil et matrice. Dans cette œuvre, l’enchevêtrement des contours de la main pivotant sur elle-même évoque une espèce de méduse. Dans l’autre, la succession des contours de ses doigts écartés constitue une sorte d’épine dorsale, une structure régulière à mi-chemin entre l’humain, le végétal et l’animal. L’utilisation de la main comme module primordial a une portée symbolique : la trace du corps sug- gère un contact, une preuve d’un passage.

 

Une brève histoire des lignes3Silvia Bächli, from the series das (to Inger Christensen), 2008-2009, Centre Pompidou, Musée national d'art moderne © Centre Pompidou, MNAM-CCI, Dist. RMN -

 

Centre Pompidou-Metz
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1, parvis des Droits-de-l’Homme


CS 90490


57020 Metz Cedex 1


Tél : +33 (0)3 87 15 39 39

À pied à 2 min de la gare TGV de Metz Ville, à 10 min du centre historique.

En voiture autoroutes A4 (Paris / Strasbourg) et A31 (Luxembourg / Lyon), sortie Metz Centre. Un parc de stationnement souterrain est accessible par l'avenue François Mitterrand, tous les jours et 24h/24. Parking de 700 places.

En bus autoroutes A4 (Paris / Strasbourg) et A31 (Luxembourg / Lyon), sortie Metz Centre. Un dépose minute groupe est disponible sur l’avenue François Mitterrand puis des places de parking réservées aux bus et autocars sont accessibles par l’avenue Louis Débonnaire.

En train Gare TGV de Metz Ville. Trains directs : à 1h20 de Paris, à 40 min de Luxembourg Ville. Gare Lorraine TGV (à 29 km de Metz, navettes à disposition) Trains directs : à 2h de Lille Europe, à 4h de Rennes, à 5h de Bordeaux, à 2h40 de Francfort.

En avion aéroport de Metz-Nancy Lorraine (33 km / 20 min environ), aéroport de Luxembourg (69 km / 45 min), aéroport de Sarrebruck (79 km / 1h), aéroport de Zweibrücken (110 km / 1h20).

Lieux : Galerie 1

Catégorie : Expositions

Tarif modulable en fonction du nombre d’espaces d'exposition ouverts le jour de votre visite. : 7€ / 10€ / 12€

Public : Tout âge


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