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La Chair dans le Marbre par Rodin au Musée Rodin…

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RODIN-.jpgLa Chair dans le Marbre par Rodin au Musée Rodin… 

Ayant présenté l’année dernière les travaux de rénovation de l’hôtel Biron visant à embellir le musée et de proposer aux visiteurs un nouveau cadre, pendant ces travaux, la salle d’exposition temporaire de la Chapelle accueillera l’exposition Rodin, la chair, le marbre. Une cinquantaine de marbres et une dizaine de maquettes en terre cuite ou plâtre seront présentées, venant témoigner de l’importance de ce matériau et du traitement qui lui est réservé dans l’oeuvre de Rodin. Si la critique moderne a fait avant tout de Rodin un modeleur et un homme du plâtre, ses contemporains avaient vu en lui le dominateur de la pierre devant lequel « le marbre tremble ». Contrairement à une idée reçue les marbres de Rodin, loin d’être conventionnels, selon ces mêmes critiques, donnent vie et forme à l’âme moderne, « cette psyché disloquée, brutale et délicate, fougueuse et lasse, négatrice et fervente ». Non content de faire jouer son sens de la synthèse plastique, Rodin sait animer un matériau classique voué, a priori, à l’immobilité. La chair, que les sculpteurs s’attachent à représenter depuis l’Antiquité, devient avec lui plus vivante que jamais.

La question des matériaux dans l’art en effet n’est pas une simple affaire technique ou esthétique. Il s’y greffe une forte dimension symbolique : ainsi le marbre renvoie-t-il à l’Antiquité, au mythe de la Grèce antique, et à l’Italie renaissante à travers la figure de Michel-Ange. Le marbre est aussi considéré comme le matériau le plus proche de la chair : dur et froid, il doit acquérir souplesse et chaleur en se transmuant sous le ciseau de l’artiste, montrant par là-même la virtuosité de ce dernier et sa capacité à transformer la matière. Cependant, comme la plupart de ses contemporains, Rodin a fait appel dès le début de sa carrière à des praticiens, et néanmoins ses marbres sont très bien identifiés et son « style », en particulier son utilisation du non finito, constitue une marque de fabrique, imitée par d’autres artistes. Il travaille par ailleurs à une époque où, justement, on se détourne de la « pratique » pour revenir à la taille directe. Longtemps dévalorisés par les critiques pour des raisons historiques et esthétiques, les marbres n’en constituent pas moins un pan très important de l’art de Rodin et il a paru intéressant de s’interroger sur leur place dans la carrière de l’artiste, à l’occasion de cette exposition. Rares sont les ouvrages consacrés aux marbres de Rodin, et le catalogue de l’exposition viendra combler une importante lacune en faisant, notamment, découvrir la fabrique du marbre (fournisseurs, praticiens...) sous un angle peu étudié jusqu’alors.

La scénographie de l’exposition est confiée au Bureau des Mésarchitectures, équipe dirigée par l’artiste et architecte Didier Faustino, et proposera un parcours dynamique qui permettra aux visiteurs de multiplier les points de vue sur les oeuvres.

Auguste-Rodin2.jpgAuguste Rodin, Paolo et Francesca dans les nuages Copyright : Musée Rodin © Christian Baraja

Le marbre est un matériau mythique, chargé de références à la Grèce antique ou à l’Italie de Michel-Ange. Il est considéré comme le plus apte à représenter la chair, peut- être par goût du paradoxe et de la virtuosité : dur et froid, le marbre acquiert souplesse et chaleur en se transmuant sous le ciseau de l’artiste. Dans une esthétique qui recherche l’illusion de la vie, il apparaît comme la matière par excellence de cette imitation.

L’abondante production -près de 400 marbres répertoriés- est due à l’emploi de nombreux praticiens, artistes souvent eux-mêmes, dont Rodin suivait de près le travail. Du modelage initial en terre, aux plâtres des maquettes, puis aux marbres, les étapes portent la marque du maître, même si plusieurs mains ont collaboré. Des débuts assez classiques aux dernières pièces, ce rapport au matériau permet d'attirer l'attention sur l'évolution du style de Rodin, du fini et du précis au flou, et au fameux non finito, comme à la multiplication sur les œuvres des traces du travail : clous pour la mise au point, points “justes” que l'artiste est censé effacer au fur et à mesure de son travail. Le marbre stimule le talent de Rodin à jouer de la lumière et des ombres, des creux et des saillies, à cultiver le modelé, par opposition à la ligne néo-classique. Le non finito, symptomatique de l'art de Rodin, dès les années 1886, est autant une réflexion sur l'inachèvement que sur la trace, et sur l'inscription du temps dans l'espace de la sculpture.

I) 1871-1890 - L’ILLUSION DE LA CHAIR

Les premières oeuvres mêlent les références antiques à l’art du XVIIIe siècle, dans un style assez caractéristique du Second empire : bustes gracieux (Orpheline alsacienne), ou philosophe à l’antique (Homme au nez cassé), sujets mythologiques (Diane, Psyché-Printemps) ou portraits à la moderne (Mme Roll).

Le traitement du marbre est illusionniste et cherche à donner l'apparence du tissu, de la dentelle, des fleurs (Mme Morla Vicuna) ou des cheveux (Tempête, Pleureuse). La représentation du corps féminin tient une place importante, que ce dernier soit jeune et beau (Danaïde, Andromède, Galatée) ou marqué par le temps (L’Hiver ou la Belle Heaulmière).

Rodin pratique surtout le petit groupe sculpté ; les corps, très finis, contrastent par leur poli avec des terrasses brutes, dont la signification est assez facile à cerner : roc sur lequel s'effondrent Andromède ou la Danaïde, fourrure ou décolleté bouillonnant dont émerge le buste de Mme Morla-Vicuna, rocher sur lequel s'appuie Galatée ou dont elle émerge. L’œuvre brouille volontiers les pistes et joue des frontières mal délimitées entre la sculpture et son socle. Rodin aime ces pièces au caractère intime et passionnel (Tête de St-Jean Baptiste, Désespoir) qui permettent une communion entre l’œuvre et le spectateur.

La Danaïde

Appelée aussi La Source, elle se rattache à la légende cinquante filles de Danaos qui avaient tué, sur ordre de leur père, leurs époux et cousins le soir de leurs noces, et pour cela avaient été condamnées à remplir éternellement un tonneau percé. C’est probablement cette vision qu’illustre ici Rodin dans cette image d’une femme épuisée par une tâche si vaine.

Le marbre extrêmement poli par la main de Jean Escoula, le modelé palpitant de la peau et du dos, le soin apporté à sa composition l’apparentent aux « morceaux de réception » du xviiie siècle. Il s’agit bien là, en tout cas, à travers une même matière, de faire sentir la chair et le rocher, l’eau et la chevelure, elle-même « liquide », selon l’expression de Rainer Maria Rilke, les nuances, enfin, non de la couleur mais du colorito, et cela grâce aux effets de la lumière sur l’œuvre.

Auguste-Rodin3.jpgAuguste Rodin, La Danaïde, grand modèle, 1889 Copyright : Musée Rodin © Christian Baraja

 

II) 1890-1900 - LA FIGURE DANS LE BLOC

Chargé de commandes, Rodin augmente sa production de marbres en transposant de nombreux sujets tirés de ses recherches pour la Porte de l’Enfer (Fugit amor). Le rôle du non finito comme effet plastique et esthétique s'accroît (Rose Beuret, La Pensée) ainsi que la taille des oeuvres. Avec l'Aurore, Rodin expérimente le traitement du visage à l'ombre d'une forte avancée, dénuée de référent iconographique. « On dirait que vous savez qu’il y a une figure dans le bloc, et que vous vous bornez à casser tout autour la gangue qui nous la cache » disait C. Mauclair (1914). Cet effet, tel qu’il le pratique, est aussi une manière de dénier toute volonté illusionniste et mimétique en valorisant, contraste à l’appui, le matériau, et accentue l’aspect symboliste de certaines œuvres (L’Amour emportant ses voiles, Le Baiser du fantôme à la jeune fille).

Le Baiser constitue un défi, masqué désormais par sa célébrité, par l'audace du geste amoureux et de la nudité à cette échelle, et par l'effacement du prétexte narratif ou mythologique. L'audace dans l'expression du désir se retrouve dans les embrassements (Le Péché) ou les jeux érotiques (Jeux de nymphes), sujets rares, car le marbre est réputé trop sérieux, et coûteux, pour des thèmes libertins, réservés aux « petits bronzes ».

L’artiste ne dédaigne pas une certaine virtuosité ; l'Illusion, fille d'Icare ou les Bénédictions défient la pesanteur par leur position d’équilibre, tandis que ses tendances pictorialistes s'expriment dans ces oeuvres-tableaux (La Terre et la lune).

 

L’Aurore

Rodin reprend ici les traits de Camille Claudel (1864-1943). À la différence du masque initial réalisé peu après leur rencontre, vers 1884, le visage n’est pas vraiment triste. Par-delà l’expression figée et absente de ce portrait, Rodin réussit, par son titre, à transmettre au modèle et au spectateur l’espoir d’un temps et d’un destin meilleurs.

Vers 1895-1897, les deux artistes sont séparés mais se revoient. Camille cherche à affirmer son identité d’artiste tandis que Rodin continue à l’aider financièrement, sans qu’elle le sache. Il lui présente Mathias Morhardt, rédacteur au journal Le Temps, qui la défendra par la suite, et la recommande à ses amis collectionneurs, journalistes, mécènes (Fenaille, Peytel) et hommes politiques. L’Aurore n’apparaît-elle pas dès lors comme la promesse d’un succès à venir, d’une reconnaissance après le travail silencieux dans l’ombre et le secret de l’atelier ?

Auguste-Rodin9.jpgAuguste Rodin, Aurore 1895 Copyright : Musée Rodin © Christian Baraja

 

Le Baiser

En 1880, l’État commande à Auguste Rodin une porte décorative consacrée à la Divine Comédie, de Dante : dès les premiers projets apparaissent Le Penseur, Ugolin et Paolo et Francesca. Ce couple évoqué au chant 5 de « L’Enfer » est celui de Paolo de Malatesta et de Francesca de Rimini, coupable d’un amour qui cause la mort et la damnation (Sanders 1975, p. 169-177), thème favori des romantiques (Bordeaux 1968).

La première esquisse de ce couple était un enroulement, sur le vantail gauche de La Porte, en face d’Ugolin sur le vantail droit ; elle en est retirée en 1887 et est remplacée par une variante du Paolo et Francesca, tout à fait dramatique. La même année, à Paris, à la galerie Georges Petit, puis à Bruxelles, Rodin montre pour la première fois le groupe (Le Normand-Romain 2007, p. 159-163) du Baiser, qui est commandé en marbre par l’État en 1888, afin de figurer à l’Exposition universelle de 1889. Jean Turcan est choisi pour faire la pratique du groupe au double du modèle en plâtre ; il laisse le groupe non achevé au printemps, et cela explique la présence de marques de repères sur le bloc de marbre et le manque de signature ; le groupe en plâtre est présenté à Chicago en 1893 (il y provoque un scandale), puis le marbre au Salon de Mai de 1898, à Paris. Il entre au musée du Luxembourg le 18 février 1901 (Lux. 132) puis au musée Rodin en 1918 (S. 1002).

Auguste-Rodin1.jpgAuguste Rodin, Le Baiser 1898 Copyright : Musée Rodin © Christian Baraja

 

Jeux de nymphes

Ce marbre, dont nous ne connaissons ni le praticien ni la date d’exécution, est d’une grâce et d’une légèreté inouïes, d’une remarquable maîtrise et virtuosité. La scène n’est tirée d’aucune légende et ne fait allusion à aucune scène mythologique. Elle semble être née du seul plaisir de l’artiste combinant à loisir des figures entre elles, les poussant parfois au seuil du déséquilibre.

La composition et le traitement des figures par rapport au fond ainsi que le caractère décoratif des motifs végétaux rapprochent cette œuvre des Océanides

Auguste-Rodin11.jpgAuguste Rodin, Jeux de Nymphes Copyright : Musée Rodin © Christian Baraja


III) 1900-1917 - VERS L’INACHEVEMENT

La gloire de Rodin devenant immense après l'exposition de l'Alma (1900), les collectionneurs se montrent sensibles aux prestiges des marbres dont le nombre s’accroît. Les oeuvres sont parfois reproduites en plusieurs exemplaires, même si la main de l’artiste reste un symbole fort (Main de Dieu). De nombreuses pièces créent un fond (Le Jour et la nuit, Dernière vision ou Mort d'Adonis/Océanides) et constituent des sortes de reliefs qui cultivent parfois un certain sfumato. De la maquette (Mains d'amant, Fée des eaux, Psyché et l’Amour) à l'œuvre finie, et contrairement à la vision classique, les œuvres semblent devenir plus floues et incertaines, et il y a là un vrai projet esthétique. Certaines œuvres (Femme slave, Psyché-Pomone) soulignent l’absence de transformation du matériau, laissant agir l'imagination du spectateur. Rodin, cependant, continue à produire des groupes mythologiques de petite taille ou de moyen format (Adam et Eve, Paolo et Francesca, Zéphyre et Psyché). Il réalise aussi des monuments d’envergure, funéraires ou non (Ariane, Monument à Victor Hugo). Dans la perspective du futur musée à son nom, il fait transposer dans le marbre des oeuvres auxquelles il tient (Fugit amor, Femme-poisson).

Enfin, des portraits (Victor Hugo, Mme Fenaille, Puvis de Chavannes) montrent l'importance croissante du matériau brut dans l'œuvre. Le buste semble alors émerger du bloc comme un bourgeon de plante, mêlant les ordres végétaux et minéraux, l’art et la nature, et poursuivant ainsi la métaphore des Fleurs dans un vase.

 

La Main de Dieu

La Main de Dieu appartient à ces œuvres des dernières années du XIXe siècle et du début du XXe dans lesquelles Rodin donne forme à sa réflexion sur l’art. Exposé dès 1896 sans doute (« Main avec groupe », à Munich), ce sujet également connu sous le titre La Création, représente en effet la genèse d’Adam et Ève, corps enlacés nés de la terre par la volonté divine, comme naissent de la main du sculpteur les images que son imagination suscite. L’image prend donc ses distances avec le texte biblique, où la création d’Adam précède celle d’Ève, mais le résultat s’en trouve renforcé au plan plastique et symbolique, d’autant que Rodin a composé son groupe par assemblage de deux petites figures dans la main droite de Pierre de Wissant, l’un des Bourgeois de Calais. Ainsi l’artiste figure-t-il la main du Créateur par une main qu’il a lui-même créée, et qui métaphoriquement peut être vue comme la sienne. L’agrandissement à une échelle monumentale, réalisé à l’occasion de la transcription de la maquette en plâtre dans le marbre, donne à l’ensemble une forte présence physique.

Auguste-Rodin5.jpgAuguste Rodin, La main de Dieu Copyright : Musée Rodin © Christian Baraja

 

Ariane

Par son ampleur, son calme si on la compare à d’autres grandes figures allongées comme la Martyre, Ariane inaugure une autre vision de la sculpture. Comme le soulignait lui-même Rodin : « Mes modelés essentiels y sont, quoiqu’on en dise, et ils y seraient moins si je “finissais” davantage en apparence. Quant à polir et repolir des doigts de pied ou des boucles de cheveux, cela n’a aucun intérêt à mes yeux, cela compromet l’idée centrale, la grande ligne, l’âme de ce que j’ai voulu, et je n’ai rien de plus à dire là-dessus au public » (« Pensée », La Revue des revues, p. 607. AMR, dossier C. Mauclair). La monumentalité de l’œuvre invite à la comparaison avec les grandes figures couchées d’Aristide Maillol, Henry Moore ou Henri, Laurens qui prennent tant d’importance au cours du XXe siècle. La même année 1905, Maillol donne la Méditerranée au Salon d’Automne, suscitant l’admiration d’André Gide, qui y voit ainsi le triomphe du calme et du silence par opposition, justement, aux œuvres – trop ? – expressives de Rodin (« Promenade au Salon d’automne », GBA, 1905, p. 478-479).

Auguste Rodin9Auguste Rodin, Aurore 1895 Copyright : Musée Rodin © Christian Baraja

 

Victor Hugo (Monument dit du Palais-Royal) Lorsqu’il fut question d’élever un monument à la gloire de l’écrivain, disparu en 1885, l’État fit appel à Rodin.

Ne pouvant se passer de modèle vivant, ce dernier choisit de construire le monument à partir du buste réalisé du vivant du poète, en 1883. En introduisant ce portrait d’après nature au sein du monument commémoratif, Rodin insuffle une vie nouvelle dans la représentation et l’évocation du souvenir du défunt.

En 1890, la Commission des Travaux d’art écarte le projet de Rodin, destiné au Panthéon, qui montre l’écrivain assis alors qu’il doit être placé en pendant au Mirabeau de Jean-Antoine Injalbert, qui était représenté debout. Jugé toutefois intéressant, on commande à Rodin la traduction en marbre, et une nouvelle destination plus neutre et « décorative » lui est attribuée, d’abord le jardin du Luxembourg, puis celui du Palais-Royal, où il prit place en 1909. Cet écrin, mi- architectural, mi-verdoyant, convint finalement assez bien à cette œuvre conçue pour le plein air.

Auguste-Rodin4.jpgAuguste Rodin, Monument à Victor Hugo 1909 Copyright : Musée Rodin © Christian Baraja

 

« RODIN ET SES PRATICIENS » De François Blanchetière, conservateur du patrimoine au musée Rodin

Au XIXe siècle, il était d’usage qu’un sculpteur confiât la réalisation de ses œuvres en marbre à des assistants spécialisés dans la taille de la pierre, les metteurs aux points et les praticiens. La phase de conception, durant laquelle l’artiste donnait naissance à son idée, le plus souvent par le modelage d’une masse de terre crue, était ainsi nettement distinguée de la phase de fabrication, vue comme purement technique. Le passage d’une phase à l’autre se faisait par le truchement d’une version en plâtre, résultant du moulage de la terre, destiné à servir de modèle pour la taille du bloc.

La première étape était la « mise aux points », c’est-à-dire le placement sur le plâtre de multiples points de repères (clous, croix, ronds ou petits points tracés au crayon) qui permettaient de reporter les dimensions du modèle vers la pierre. Le report de ces mesures pouvait se faire à l’échelle, et dans ce cas le marbre avait les mêmes dimensions que le plâtre, ou avec un facteur démultiplicateur, afin d’obtenir une œuvre plus grande que son modèle. Une fois le bloc préparé selon cette méthode, le praticien pouvait donner au marbre la forme désirée à l’aide de divers outils, toujours en se référant au plâtre confié par le maître. Si Rodin ne prenait que très rarement les outils, il surveillait en revanche le travail de près et donnait régulièrement des instructions par oral, par écrit ou encore par des indications matérielles (en noircissant certaines zones au crayon, par exemple, ou en creusant la surface à certains endroits).

Les archives du musée Rodin nous permettent de connaître assez bien les circonstances de la réalisation des marbres. A l’heure actuelle, nous recensons un peu plus de 400 œuvres en marbre ou en pierre (dont une centaine est conservée au musée). Le nombre des praticiens, logiquement, est lui aussi élevé : on peut considérer qu’ils sont une centaine à avoir travaillé pour le sculpteur au long de sa carrière – certains très brièvement, d’autres pendant plusieurs décennies. S’ils étaient peu nombreux au début (on en compte six ou sept seulement durant les années 1870), ils étaient en revanche assez proches de Rodin : les relations étaient alors plutôt celles de collègues que de patron à employés. Dans les années 1880, le sculpteur commence à connaître le succès, et son atelier se développe. Les œuvres de cette période, qui dérivent souvent des recherches menées pour la Porte de l’Enfer, marquent l’apparition d’un style personnel. La décennie 1890 accentue ce mouvement, et l’on compte alors une dizaine de praticiens travaillant pour Rodin chaque année. La répétition de certains sujets met en évidence l’évolution du style de l’artiste, avec l’apparition de l’effet de non finito (inachèvement volontaire de certaines parties, notamment la base, dont la forme semble émerger).

Après 1900, Rodin est reconnu comme le plus grand sculpteur de son temps, et les commandes affluent. L’organisation très efficace de son atelier lui permet d’y répondre : jusqu’à une vingtaine de praticiens peuvent travailler simultanément, sous le contrôle plus ou moins direct du maître. Certains œuvrent sous ses yeux, d’autres dans leur atelier personnel, où il leur rend régulièrement visite. N’ayant pas à mener lui-même la phase de fabrication, l’artiste peut se concentrer sur la conception, l’invention de formes nouvelles. Âgé de plus de soixante ans, Rodin n’en reste pas moins très actif et productif, en bonne partie grâce à ce système. De nombreux sculpteurs le sollicitent d’ailleurs pour entrer à son service comme praticiens, certains principalement parce qu’ils cherchent un revenu, d’autres parce qu’ils souhaitent apprendre auprès de lui, en contribuant personnellement à la réalisation de ses œuvres.

Auguste-Rodin6.jpgAuguste Rodin, Mains d’amants 1904 Copyright : Musée Rodin © Christian Baraja

 

Artiste et architecte, Didier Faustino travaille sur la relation intime entre le corps et l’espace. Son approche est multiforme, de l’installation à l’expérimentation, de la création d’œuvres plastiques subversives à celle d’espaces propices à l’exacerbation des sens.

Didier Faustino a créé le Bureau des Mésarchitectures en 2002 et a reçu en 2010 le « Prix Dejean, Grande Médaille d’Argent », décerné par l’Académie d’Architecture pour l’ensemble de ses travaux. Il a participé à de nombreuses biennales (Venise, Taipei, Yokohama, Sao Paulo, Istanbul, Pékin...) et a créé Evento, le nouveau rendez-vous artistique et urbain de Bordeaux, en 2009.

Parmi leurs œuvres emblématiques, la H Box d’Hermès (2006), pavillon vidéo itinérant destiné à être présenté à travers le monde, Body in Transit (2000), espace minimal et critique de transport de clandestins, présenté à la Biennale de Venise, Double Happiness (2009), double balançoire aérienne présentée à la biennale de Hong Kong / Shenzhen, ou encore Révolution(s) (2004), plafond chrysalide pour le Musée d’Art Moderne de la Ville de Paris présenté au Couvent des Cordeliers.

Ils travaillent actuellement sur plusieurs projets, notamment, La maison du projet, pavillon destiné à présenter le projet du Grand Lyon aux riverains sur les rives de Saône, L'écume des jours, projet de revalorisation de la façade de l'Hôpital Nord de Marseille, ou encore pour la création d’un espace d’exposition et de restauration dans la culée rive gauche du pont Alexandre III à Paris.

Pour l'exposition Rodin, la chair, le marbre, le Bureau des Mésarchitectures propose de transporter le spectateur dans ce temps de "l'esquisse" inhérent à l'œuvre du sculpteur. Réinvestissant certaines thématiques de Rodin - corps, mouvement, déséquilibre - un cheminement incertain se déploie dans la salle d’exposition. L’espace prend alors la forme d'un atelier fantasmé où les œuvres, comme remisées, sont révélées de façon inédite.

A la taille du marbre d'apparence inachevée, répondent des tasseaux de bois brut cerclés de métal qui forment les socles des sculptures. Dessinant comme une architecture dans l'espace, ils s'échelonnent selon différentes hauteurs au sein d'allées jalonnées de plateformes inclinées. Cette topographie veut laisser une amplitude au parcours du spectateur qui dans cette scénographie est invité à tenir un rôle actif. Introduisant une notion d'équilibre précaire dans l'espace d'exposition, le relief accidenté invite à un mouvement gravitationnel autour des œuvres présentées.

Comme l'artiste à l'œuvre, il appartient dés lors au visiteur de redéfinir non finito sa place parmi les multiples points de vue qui s'offrent à lui.

Auguste-Rodin7.jpgAuguste Rodin, Centauresse Copyright : Musée Rodin © Christian Baraja

 

Exposition Rodin, la chair, le marbre Du 8 juin au 3 mars 2013

Musée Rodin

79, rue de Varenne 75007 Paris

T. +33 (0)1 44 18 61 10

M° Varenne           

Commissaire de l’exposition

Aline Magnien, conservateur en chef du patrimoine et responsable des collections du musée Rodin

Scénographie exposition Rodin, la chair, le marbre Bureau des Mésarchitectures / Didier Faustino

Catalogue exposition Rodin, la chair, le marbre 4 essais, 232 pages et environ 250 illustrations Éditions du musée Rodin/ Fernand Hazan Prix 35 €

Autour de l’exposition

L’actualité de l’exposition en direct sur le site internet, plus de photos, de news, de vidéos

http://www.musee-rodin.fr/fr/exposition/rodin-la-chair-le-marbre

Petit journal en français et en anglais Visites en famille, le mercredi à 15h Visites en groupe, de 10 à 25 personnes sur réservation au 01 44 18 61 24 du lundi au vendredi de 10 à 16h. Audio-guide pour visiteur individuel Visite conférence tous les dimanches à 15h Écoles, collèges, lycées, visites en groupe accompagnées ou autonomes sur réservation Pour les enseignants formations sur inscriptions et dossier documentaire en ligne Journées d’études

Mercredi 13 juin à 19h30 : Lecture dans le cadre de l’exposition, Rodin, la chair, le marbre. «En pensant avec tout son corps», Rainer Maria Rilke Lecture par Robert Bensimon des deux conférences de Rilke intitulées «Auguste Rodin», de 1903 et de 1907. Comédien, Robert Bensimon prend la voix du poète Rainer Maria Rilke, secrétaire de Rodin, ses écrits sur l’œuvre du maître nous apportent un éclairage déterminant.

7 € entrée du musée à tarif réduit et 6 € ticket conférence | Jardin exceptionnellement fermé

Informations pratiques Rencontres Nocturnes

Réservation indispensable sur reservation@musee-rodin.fr dans la limite des places disponibles. T 01 44 18 61 24 de 10h à 16h tous les jours sauf le samedi et dimanche. En cas d’intempérie, le musée se réserve la possibilité d’annuler ou de reporter la programmation. Le café de Varenne dans le jardin joue le jeu et accompagne les nocturnes avec une formule apéritive à 3 € sur présentation du billet d’entrée du musée.

Toute la programmation sur www.musee-rodin.fr

Horaires et tarifs musée Rodin

Tous les jours (sauf lundi, 1er mai, 25 décembre, 1er janvier) de 10h à 17h45 Nocturnes jusqu’à 20h45 les mercredis (fermeture caisse 30 minutes avant) Entrée 9€ Gratuit pour les enseignants et les jeunes 18-25 ans de l’U.E

Jardins du Musée Rodin, tous les jours (sauf lundi) 10h-17h (hiver) ou 18h (été) : Entrée 1€.

Contact Presse

Claudine Colin Communication Eva Astaburuaga Dalla Venezia T. +33 (0)1 42 72 60 01 eva@claudinecolin.com

Auguste-Rodin10.jpgAnonyme, Rodin au dépôt des marbres à côté de la Main de Dieu - Musée Rodin © Christian Baraja


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